Les Nations unies ont annoncé, ce vendredi 23 octobre, un cessez-le-feu global et permanent en Libye entre le camp de Khalifa Haftar à Benghazi et celui du gouvernement d’union nationale basé à Tripoli. Les belligérants ont signé un accord après cinq jours de discussions à Genève.
Depuis la conférence de Berlin en janvier 2020, trois commissions ont négocié pour sortir de la crise. La dernière, à Genève, était chargée des questions sécuritaires et militaires. « Beaucoup reste à faire dans les semaines à venir », estime toutefois Stéphanie Williams, cheffe de la Manul, la force onusienne présente dans le pays. Et si le chemin pour aboutir à cet accord de cessez-le-feu « global et permanent » a été « long et difficile », ce qui reste à faire l’est aussi.
Départ des mercenaires
Selon l’accord, les mercenaires étrangers doivent quitter la Libye dans une période de 90 jours, à compter de ce vendredi 23 octobre. C’est un point très important pour que la paix puisse être effective. Dans le même temps, les forces armées locales doivent retourner à leurs bases et se retirer des alentours de Syrte. Des comités militaires conjoints veilleront à l’application de l’accord et se chargeront du mécanisme de retrait, de la formation des forces communes à qui on confie la sécurité du pays.
La question des milices est laissée au nouveau gouvernement d’union nationale, qui devrait les dissoudre tout en intégrant certains de ces éléments dans l’armée régulière. Le gouvernement doit aussi terminer le travail sur la réunification de l’armée.
Cet accord marque une avancée dans la mesure où les militaires s’engagent à un cessez-le-feu immédiat, s’engagent aussi à un retrait des mercenaires dans un délai court de 3 mois et surtout le retrait des forces militaires de l’est et de l’ouest des villes de Syrte et d’al-Joufra.
Une réunion inclusive, sous l’égide de l’ONU, regroupant des représentants des deux parties, de l’ancien régime, mais aussi de la société civile, doit avoir lieu le 9 novembre prochain en Tunisie. On devrait y discuter notamment de la nomination d’un gouvernement d’union nationale. Ces discussions se feront une fois encore sans Moscou, ni Ankara, ni Abou Dhabi.
« Un travail difficile nous attend »
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a salué l’accord de cessez-le-feu, jugeant qu’il s’agissait d’« une étape fondamentale vers la paix et la stabilité en Libye ». Sans les nommer, il a appelé les acteurs régionaux à le respecter, et s’assurer de son application au plus vite.
« J’en appelle à la communauté internationale pour soutenir les Libyens à implémenter ce cessez-le-feu, et à mettre fin à ce conflit. J’invite les parties libyennes à maintenir le momentum actuel. Il n’y a pas de solution militaire au conflit en Libye, cet accord de cessez-le-feu est une étape critique. Un travail difficile nous attend. »
Le secrétaire général a insisté sur le fait que la résolution du conflit devait être gérée par et pour les Libyens, une critique entre les lignes de l’Égypte, la Russie et les Émirats arabes unis qui soutiennent le maréchal Haftar, et de la Turquie, alliée du GNA de Sarraj, rapporte notre correspondante à New York, Carrie Nooten. D’autant que la Turquie a déjà mis en doute la viabilité de ce cessez-le-feu, qui n’a pas été conclu au plus haut niveau selon elle.
Quelques heures à peine après avoir été paraphé par dix haut gradés militaires, Recep Tayyip Erdogan a en effet moqué cet accord pour son manque de crédibilité, explique notre correspondant à Tunis, Mathieu Galtier. Pour le président de la Turquie, présente militairement au côté des forces du gouvernement de Tripoli, les signataires malgré leur grade de majors et de brigadiers généraux n’ont aucun poids.
Signe positif concret à noter : pour la première fois depuis des années, un vol civil a relié ce vendredi matin Tripoli à Benghazi.
Les Nations unies veulent arracher une résolution du Conseil de sécurité qui serait contraignante et l’UE travaille également sur une série de sanctions qui s’imposeraient à toute entité s’opposant à l’application de cet accord.