Le sud de la Tunisie s’est invité à l’annuelle récompense du cinéma français. Un fils, coproduction franco-tunisienne tournée dans le désert, a décroché l’un des trophées les plus prestigieux de la cérémonie, celui du meilleur acteur, pour Sami Bouajila. Tournée dans le gouvernorat de Tataouine, au sud du sud du pays, pas loin de la frontière libyenne, cette histoire de filiation est le premier film de Mehdi Barsaoui. Présenté à la Mostra de Venise 2019, dans la section « Horizon », le film avait emporté le prix du meilleur acteur. Dix-huit mois après, c’est un césar qui salue les trente ans de carrière de Sami Bouajila, qui a démarré avec La Thune, en 1991, une comédie de Philippe Galland dont il était le premier rôle.
L’affiche du film « Un fils » de Mehdi Barsaoui. © DR
Il alternera films grand public et projets plus personnels. Il a été à l’affiche des Silences des palais de Moufida Tlati, écrit par Nouri Bouzid, qui obtiendra un succès critique important au Festival de Cannes de 1994 ainsi qu’une mention spéciale du jury Caméra d’or. Il a enchaîné avec un projet enragé de Karim Dridi, Bye-Bye, également remarqué à l’époque.
Avec Denzel Washington et Bruce Willis
Olivier Doran lui confie un des rôles du film choral Le Déménagement, succès public. Bouajila file ensuite aux États-Unis rejoindre l’acteur de Die Hard, Annette Bening et Denzel Washington dans Couvre-feu d’Edward Zwick. Il y interprète, trois ans avant le 11 Septembre, un terroriste infiltré dans New York. Comme de nombreux acteurs dont les parents étaient originaires du Maghreb, Sami Bouajila se heurtera aux rôles caricaturaux que proposent les studios hollywoodiens. Abdellatif Kechiche, originaire de Tunis, l’embauche pour La Faute à Voltaire. Succès. Michel Blanc, Arnaud Desplechin succéderont à ce blockbuster qui fera une longue vie en DVD, VOD, streaming. Rachid Bouchareb (Indigènes, Hors-la-loi) lui offrira deux montées des marches au Festival de Cannes ainsi qu’un prix d’interprétation collectif, en 2006, partagé avec Jamel Debbouze et Roschdy Zem. Ce dernier présidait d’ailleurs la cérémonie des César 2021. Un fils est l’un des rôles les plus denses que Sami Bouajiila a pu interpréter. Le film a valu à son jeune metteur en scène beaucoup d’éloges. Ce matin, dans ce sud désertique de la Tunisie, une région frontalière riche en beauté et en tragédies, on peut se targuer d’un césar par Bouajila interposé. L’acteur avait déjà emporté le césar du second rôle pour Les Témoins d’André Téchiné. Téchiné qui avait fait tourner Abdellatif Kechiche dans Les Innocents en 1987. Une boucle est bouclée. (Le Point)