Face aux nombreux défis sécuritaires auxquels il est confronté, le Tchad veut lancer une nouvelle réforme de l’armée pour augmenter entre autre ses effectifs et les faire passer en 2022, de 35 à 60 000 hommes. Pour cela, il a fait adopter vendredi dernier par l’Assemblée nationale sortante qui devait être dissoute le lendemain, une ordonnance portant statut général des militaires des forces de l’ordre et de sécurité.
Jusqu’ici les soldats tchadiens touchaient plutôt un forfait, mais avec cette nouvelle réforme ils vont désormais jouir d’une solde plus consistante et la même à grade égal. L’évolution des grades et des carrières, les pensions… Toute leur trajectoire sera désormais réglementée, selon le ministre tchadien de la défense, le général Daoud Yaya Brahim.
Mais depuis, l’opposition est montée au créneau. Succès Masra du parti Les Transformateurs dénonce un texte « majeur pour la vie du pays » adoptée un vendredi soir en catimini et par une Assemblée nationale sans aucune légitimité. Il s’insurge également contre une ordonnance qui ne résout pas selon lui, les principaux défis auxquels fait face l’armée tchadienne. Succès Masra pointe notamment une armée dominée aujourd’hui par trois tribus, les Zaghawas, les Goranes et les Arabes. Une armée à double vitesse avec une garde présidentielle, la DGSSEI totalement choyée au détriment d’autres corps, alors que la plupart de soldats ne sont pas bien formés.
Le moment choisi passe mal
Toutes ces critiques sont balayées d’un revers de main par le ministre tchadien de la Défense qui nous assure qu’il a aujourd’hui 10 000 hommes dans les centres d’instruction, issus de toutes les composantes de la société. Quant au financement de toutes ces réformes alors que les caisses de l’État sont vides, le Tchad pourra compter sur l’appui de ses partenaires dit-il.
Mais c’est surtout le moment choisi par la junte militaire pour faire adopter ce texte qui passe mal auprès de l’opposition. C’était au dialogue national inclusif ou au futur gouvernement élu d’orchestrer une réforme aussi cruciale de l’armée, a regretté Succès Masra.
Un spécialiste du Tchad rappelle, lui, qu’une réforme aussi ambitieuse avait déjà été initiée en 2010, sans beaucoup de résultats. (rfi.fr)