Tout sourire avec le président chinois ce vendredi, tout musclé avec ses troupes en Biélorussie et à la frontière ukrainienne. Vladimir Poutine consulte tous azimuts. Emmanuel Macron sera reçu lundi à Moscou.
Stopper l’expansion orientale de l’OTAN. C’est depuis des semaines l’un des objectifs affichés du président de Russie Vladimir Poutine. Il a reçu ce vendredi un soutien de poids, celui de Pékin, à l’occasion de sa visite pour l’ouverture des Jeux Olympiques d’hiver. Depuis deux ans, le président Chinois Xi Jinping n’avait pas reçu le moindre leader, pour cause de pandémie. Mais pour symboliquement faire bloc contre Washington, l’occasion était trop belle.
Ils dénoncent les alliances militaires occidentales
Les deux leaders ont publié une déclaration commune, dénonçant le rôle des alliances militaires occidentales, l’Otan et Aukus (alliance militaire entre l’Australie, le Royaume-Uni et les États-Unis), menées par les États-Unis. Pékin et Moscou les jugent destructrices pour la stabilité et une paix équitable dans le monde. En particulier, ils se disent opposés à tout élargissement futur de l’Otan. Au passage, le groupe gazier russe Gazprom a annoncé une augmentation de ses exportations vers la Chine.
En échange, la partie russe réaffirme son soutien au principe d’une seule Chine, et confirme que Taïwan constitue une partie inaliénable de la Chine et s’oppose à toute forme d’indépendance.
S’agit-il, comme l’affirment Moscou et Pékin, d’une nouvelle ère dans les relations internationales ? La relation sino-russe n’est pas dépourvue de rivalités ni de contentieux. Mais c’est en tous les cas un axe puissant. Un désaveu ostensible opposé à l’ambition américaine de faire de son duel avec la Chine le facteur structurant du siècle.
Emmanuel Macron en médiateur à Moscou
Sur le flanc occidental, Poutine continue de garder deux fers au feu.
Avec d’abord une menace d’escalade militaire. Outre les 100 000 hommes massés à la frontière ukrainienne, l’Otan estime à 30 000 le nombre de soldats russes en cours de déploiement en Biélorussie.
L’autre levier est diplomatique. Avec une consultation constante entre leaders.
Emmanuel Macron sera lundi à Moscou, puis mardi à Kiev. Il s’est entretenu à quatre reprises avec le président russe ces derniers jours. Je t’attends […]. Tu es un interlocuteur de qualité […] je veux aller au fond des choses avec toi, lui aurait dit Poutine jeudi au téléphone, indique-t-on à l’Élysée. Prêt à s’engager dans un dialogue structuré pour résoudre les problèmes. En prenant tout le temps qu’il faut.
« Aucune incursion en Ukraine, aucune »
L’objectif est de servir un processus de désescalade. D’offrir une porte de sortie à Poutine, un peu comme le fit Nicolas Sarkozy (en pleine présidence française de l’UE) en 2008 en Géorgie ? Peut-être. Les ambiguïtés allemandes sur le gaz russe et le départ du pouvoir de l’ancienne chancelière Angela Merkel fin 2021, remplacée par un, pour l’instant, discret Olaf Scholz, offrent en outre au président français un espace politique auquel l’Élysée œuvre depuis des semaines.
Avec quelles attentes ? L’exigence, c’est qu’il n’y ait aucune incursion en Ukraine, aucune, affirme-t-on à l’Élysée. C’est notre attente principale. Le terrain de jeu sur lequel Paris peut peser diplomatiquement, c’est d’abord le format dit Normandie (Russie, Ukraine, France, Allemagne), dont la mission porte non pas sur les accords de sécurité à l’échelle continentale, mais sur les accords de Minsk (signés en 2015 pour mettre fin à la guerre civile en Ukraine avec les séparatistes prorusses) et la pacification du Donbass. À l’Élysée, on ne cache pas le souhait de pouvoir organiser, à Paris, une rencontre à quatre au sommet.
Sur le chemin du retour, après sa visite à Moscou et à Kiev, le président Macron pourrait se rendre à Berlin pour une rencontre à trois, avec le chancelier Scholz et le président polonais Andrzej Duda. (Ouest France)