Le parquet égyptien a ouvert ce week-end une enquête contre Ibrahim Eissa, connu pour sa croisade contre les extrémistes religieux. Le journaliste est accusé d’avoir mis en doute à la télévision un miracle attribué par la tradition musulmane au prophète Mahomet.
L’homme, qui a écrit plusieurs livres dénonçant les bigots – et notamment les Frères musulmans, bêtes noires du régime d’Abdel Fattah Al-Sissi –, a provoqué le tollé dans le pays très majoritairement musulman, pour avoir dit vendredi soir ne pas croire que le prophète Mahomet s’était envolé au septième ciel sur une monture ailée. Aussitôt, le très zélé député Moustafa Bakri a soulevé la question au Parlement et a déposé une plainte, tandis que la Commission officielle des médias a dit chercher à établir s’il y avait matière à sanctions.
Une figure de la presse indépendante
Samedi soir, le bureau du procureur général a annoncé « ouvrir une enquête après le dépôt de plusieurs plaintes » contre l’auteur notamment de Mawlana, un best-seller devenu un film dénonçant les travers des télévangélistes musulmans. Figure de la presse indépendante régulièrement inquiétée sous Hosni Moubarak, renversé en 2011 par le Printemps arabe, Ibrahim Eissa a reçu de nombreux prix internationaux.
Depuis l’arrivée au pouvoir d’Abdel Fattah Al-Sissi en 2013, le journaliste a arrêter les émissions politiques pour se concentrer sur sa croisade personnelle : démonter le discours des tenants de l’islam rigoriste, qui n’a cessé de gagner du terrain en Egypte ces dernières décennies. En novembre, dans son émission quotidienne de télévision, il s’insurgeait d’avoir vu un pharmacien lisant le Coran, l’exhortant à « lire en priorité des livres sur les médicaments ».
Débat sur les réseaux sociaux
Vendredi, il a donc franchi un nouveau palier : « Il n’y a pas eu de voyage au septième ciel, c’est une pure invention », a-t-il dit avant d’ajouter que « les imams ne font que vous apprendre à vous mêler de la vie des gens ». « Le voyage au septième ciel a bien eu lieu, personne ne peut le remettre en question », a aussitôt répondu le Conseil islamique officiel.
Sur les réseaux sociaux, partisans et détracteurs s’opposaient encore dimanche. Les uns saluent « un intellectuel menant la révolution contre les radicaux », tandis que les autres l’accusent de « vouloir créer le doute sur le Coran ». (20 Minutes)