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ETHIOPIE. Le grand barrage sur le Nil bleu a produit sa première électricité

Le Grand barrage de la Renaissance (GERD) est contesté par le Soudan et l’Egypte, tous deux dépendants du Nil pour leurs ressources en eau.

Un jour tant attendu, après 11 ans de travaux et de négociations difficiles avec l’Egypte et le Soudan. L’Ethiopie a officiellement lancé, le 20 février 2022, la production d’électricité de son Grand barrage de la Renaissance (Grand Ethiopian Renaissance Dam, GERD), sur le Nil bleu.

Une « ère nouvelle »

C’est « la naissance d’une ère nouvelle », a lancé le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed en allumant la première turbine du GERD. « Cette journée, pour laquelle les Ethiopiens ont tant sacrifié, que les Ethiopiens ont tant espérée, pour laquelle ils ont tant prié, cette journée est enfin là », a-t-il ajouté en présidant la courte cérémonie de lancement.

Au lancement du projet, chaque fonctionnaire avait été appelé à contribuer à hauteur d’un mois de salaire au financement du barrage. Par la suite, de nombreux emprunts publics avaient également sollicité les économies des Ethiopiens.

Un ouvrage contesté

Le barrage est depuis son lancement contesté par les pays en aval du Nil, qui veulent garder la maîtrise des eaux du fleuve et de son débit. Les multiples négociations depuis dix ans n’ont jamais vraiment abouti sur un accord, même si les trois pays concernés par le barrage ont rapproché un peu leurs points de vue.

Le ministère égyptien des Affaires étrangères a regretté le 20 février que « l’Ethiopie persiste dans ses violations de la Déclaration de principes de 2015 signée » entre les trois pays et prévoyant la recherche d’une solution négociée. Saisie l’été dernier, l’ONU leur avait recommandé de poursuivre leurs pourparlers sous l’égide de l’Union africaine (UA).

Le Caire et Khartoum, inquiets pour leur approvisionnement en eau, avaient demandé à Addis-Abeba de stopper le remplissage du barrage. L’Ethiopie avait néanmoins procédé en juillet 2021 à la seconde phase de remplissage du barrage, annoncé comme un des plus gros d’Afrique avec un objectif de production initiale de 6 500 mégawatts, revu à la baisse à 5 000 MW, soit le double de la production actuelle de l’Ethiopie.

« Comme vous le voyez, cette eau génère de l’énergie puis continue de couler comme avant vers le Soudan et l’Egypte, contrairement aux rumeurs qui affirmaient que les Ethiopiens voulaient bloquer l’eau pour les affamer. »Abiy Ahmed, Premier ministre éthiopien

à l’AFP

« Au bénéfice de toute la région »

« C’est une bonne nouvelle pour notre continent et pour les pays en aval avec lesquels nous aspirons à travailler ensemble », a ajouté le Premier ministre éthiopien sur Twitter. « Ce grand barrage a été construit par les Ethiopiens, mais au bénéfice de tous les Africains, pour que tous nos frères et sœurs d’Afrique en profitent », a affirmé un haut responsable participant à l’inauguration.

Getachew Reda, porte-parole du Front populaire de libération du Tigré (TPLF), en guerre contre les forces gouvernementales depuis novembre 2020 dans le nord du pays, a accusé M. Abiy de s’attribuer les mérites d’un projet lancé sous un gouvernement alors dirigé par les Tigréens. Divers responsables éthiopiens ont toutefois loué les efforts d’Abiy Ahmed pour achever le financement d’un projet qui a longtemps traîné et frôlé l’échec.

« Notre pays a tant perdu, surtout financièrement, en raison des retards de travaux », a souligné le directeur général du projet Kifle Horo lors de ses remarques d’ouverture. Des retards dus notamment aux menaces de l’Egypte et du Soudan, qui se sont opposés à la construction de ce barrage. Le Caire invoquait un « droit historique » sur le fleuve et « un droit de véto » empêchant tout projet de contstruction. En 1959, après un accord avec Khartoum sur le partage des eaux, l’Egypte s’était attribuée un quota de 66% du débit annuel du Nil, contre 22% pour le Soudan.

Il y a encore quelques mois, le président égyptien menaçait la région d’une guerre de l’eau si le Grand barrage construit par l’Ethiopie sur le Nil privait l’Egypte « d’une seule goutte d’eau ».

Un risque potentiel de conflit

N’étant pas partie prenante de ces accords, l’Ethiopie ne s’est jamais considérée liée par eux et, en 2010, un nouveau traité signé par les pays du bassin du Nil, qui prend sa source en Ouganda, a supprimé le droit de veto égyptien et autorisé des projets d’irrigation et de barrages hydroélectriques.

Selon les médias d’Etat éthiopiens, la production initiale du GERD est de l’ordre de 375 MW avec la mise en service d’une première turbine, sur les treize de l’ensemble du barrage. Une deuxième turbine devrait être mise en marche d’ici quelques mois, et l’ensemble du barrage être pleinement opérationnel en 2024, a indiqué à l’AFP Kifle Horo. (franceinfo)

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