lundi, novembre 25, 2024
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Cybersécurité. L’AFRIQUE organise sa riposte face aux menaces

Si elle ne se voit pas forcément au grand jour, la cybercriminalité prend de l’ampleur sur le continent. Et désormais les répercussions se chiffrent en milliards de dollars. Selon un rapport de Kaspersky, le phénomène a réduit, en 2021, le produit intérieur brut (PIB) du continent africain de plus de 10 %, pour un coût estimé à 4,12 milliards de dollars. Des chiffres sous-estimés, selon les experts, et qui augmentent à mesure que la numérisation du continent s’améliore. Interpol pour sa part précise que, en juin 2020, l’Afrique du Sud, pays le plus industrialisé d’Afrique, comptait le troisième plus grand nombre de victimes de cybercriminalité dans le monde, les pertes sont estimées à environ 147 millions de dollars par an. Là où le bât blesse, c’est que ce sont les entreprises, et donc le secteur privé aussi, qui payent le plus lourd tribut. 70 % des attaques subies par ces dernières relèvent de tentatives d’hameçonnage. Face à cet amer constat, les États africains ont décidé de prendre le taureau par les cornes.

Les États prennent les choses en main

« La cybersécurité est l’un des enjeux majeurs de notre temps », pose en guise de diagnostic, le chef de l’État togolais, Faure Gnassingbé. « Au Togo [?] se pose en particulier l’épineuse question de la protection des usagers et, donc, de la sécurité ? en plus des repères classiques de l’accessibilité et de la disponibilité à un prix abordable », a déploré le président togolais, à l’ouverture d’un sommet sur la cybersécurité qui se tenait au Centre international des conférences de Lomé, la capitale togolaise, les 23 et 24 mars. Face à des experts, dirigeants et responsables politiques venus de tout le continent, il a insisté sur la « mise en place de structures opérationnelles nationales en matière de cybersécurité, ouvrant la voie à une coopération active avec les pays africains et avec tous les acteurs de l’écosystème numérique ». C’était tout l’enjeu de ce rendez-vous de Lomé, permettre aux acteurs africains de réfléchir ensemble aux voies et moyens de répondre à cette épineuse problématique devenue un véritable fléau mondial. Notamment dans un contexte où la guerre en Ukraine fait craindre aux pays occidentaux une recrudescence d’attaques venues de Russie.

Pour Cina Lawson, la ministre togolaise de l’Économie numérique et de la Transformation digitale, avec l’Internet, « nous vivons dans un monde de plus en plus connecté. Nous, en tant que gouvernements, devons assurer que les enjeux de cybersécurité et de lutte contre la cybercriminalité soient abordés de manière collaborative : une collaboration entre les gouvernements, la société civile et le secteur privé d’une part, mais aussi une collaboration entre les experts de différents champs de compétence ».

Au Togo, les autorités affichent leurs ambitions dans ce domaine. Ces dernières années, le pays entreprend des réformes, et s’active pour devenir un hub digital attractif pour les investisseurs tout en leur garantissant une souveraineté numérique, la sécurité et la protection des données. Le pays s’est doté du premier Data Center de Tier 3 en 2021 et a renforcé son cadre juridique. Il a procédé à l’opérationnalisation de l’Agence nationale de la cybersécurité (Ancy), il s’est également doté d’un Centre national de réponse aux incidents de cybersécurité (Cert), qui a pour mission d’identifier, d’analyser et d’atténuer les cybermenaces.

Le 18 mars dernier, le pays a franchi un cap en réceptionnant le premier câble sous-marin de Google, Equiano qui « constitue un instrument essentiel et stratégique dans la réalisation de projets ambitieux de digitalisation au Togo. Ce câble aura un impact direct sur la connectivité au Togo, et permettra d’offrir un accès Internet à haut débit amélioré et abordable à des millions de Togolais et aux populations de la région d’Afrique de l’Ouest », a rassuré Faure Gnassingbé, qui s’est vu décerné lors de ce sommet, le prix du champion d’Afrique de la cybersécurité par la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA).

Si les États se révèlent vulnérables, sur le continent, plus de 90 % des entreprises opèrent sans utiliser les protocoles de cybersécurité nécessaires. Il existe également une pénurie de professionnels de la sécurité certifiés. En 2018, le nombre de professionnels de la sécurité certifiés était estimé à 7 000, soit un pour 177 000 personnes. Autre problématique, l’absence de cadre juridique/réglementaire sur la cybersécurité et la protection des données. Sur 54 États africains, seuls 28 d’entre eux disposent d’une législation sur la protection des données et 6 sont en train de rédiger une législation. « À l’heure de la cyber-incertitudes, chaque nation africaine doit également créer son propre programme national de cybersécurité », a conseillé Vera Songwe, la secrétaire générale adjointe de l’ONU et secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique.

Faire du numérique un vecteur de croissance

En effet, l’Afrique est engagée dans une course contre la montre alors que l’économie numérique ne cesse de croître. Selon la Société financière internationale et Google cités par Vera Songwe, l’économie de l’Internet en Afrique devrait contribuer à hauteur de 180 milliards de dollars à l’économie globale du continent d’ici à 2025, pour atteindre 712 milliards de dollars en 2050. « L’Afrique offre une multitude d’opportunités économiques dans pratiquement tous les secteurs. Et l’économie numérique représente un atout essentiel pour débloquer ces opportunités. [?] Toutefois, la cybersécurité est un pilier important pour toute transformation numérique », a rappelé l’ancienne de la Banque mondiale et de la Société financière internationale.

Pour le président togolais Faure Gnassingbé, la « volonté de faire du numérique un vecteur de croissance et de développement du pays est en droite ligne avec les objectifs de la Convention de l’Union africaine sur la cybersécurité et la protection des données à caractère personnel, adoptées à Malabo, le 27 juin 2014 ».

La Déclaration de Lomé invite à faire plus

Au terme de ce sommet de haut niveau, les ministres présents ont adopté par acclamation une déclaration conjointe, la Déclaration de Lomé sur la cybersécurité et la lutte contre la cybercriminalité qui vise à formaliser l’ensemble de leurs engagements. À la suite de quoi, le ministre togolais de la Sécurité et de la Protection civile, a invité les gouvernements africains à multiplier les initiatives régionales et internationales permettant aux autorités et agences compétentes du secteur de cybersécurité de renforcer leurs capacités, notamment à travers la mise en place de formations et le partage de leurs expériences respectives. (Le Point)

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