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Lula en visite en Chine pour relancer les relations sino-brésiliennes

Lula entame, ce mardi 11 avril 2023, une visite officielle en Chine, jusqu’au 14 avril. Le voyage était prévu pour la fin mars, mais le président brésilien avait dû reporter son déplacement à cause d’une pneumonie.

L’ancien président d’extrême droite Jair Bolsonaro (2019-2022) répétait que la Chine était en train « d’acheter le Brésil » et avait multiplié les déclarations anti-chinoises, en particulier pendant sa campagne électorale. Lula, de retour au pouvoir depuis le 1er janvier, cherche donc à trancher avec ces discours hostiles et à briser l’isolement diplomatique de son pays, pour positionner le Brésil comme leader de premier plan à l’échelle mondiale.

« Le Brésil continue de demander avec insistance une place au Conseil de sécurité de l’ONU, bien qu’il n’ait à peu près aucune chance de l’obtenir », souligne le géographe Hervé Théry, professeur à l’université de Sao Paulo. « Cela fait partie d’une tentative de s’affirmer un peu entre deux : le Brésil essaye tantôt d’entrer dans le club des grands, par exemple en candidatant à l’OCDE, et tantôt de se poser en leader de ce qu’on appelait jadis le tiers-monde. » Le Brésil essaye ainsi également de relancer les Brics, ce club hétéroclite des grands pays en développement, qui réunit le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud.

Médiation en Ukraine

Dans cette stratégie diplomatique, Lula tente par ailleurs de se positionner comme médiateur de la guerre en Ukraine. Sous ses deux premiers mandats, entre 2003 et 2010, Brasilia avait déjà joué les intermédiaires dans le dossier du nucléaire iranien. Aujourd’hui, le pays a une position ambiguë sur la guerre en Ukraine. D’un côté, Lula dit que la Russie ne peut pas s’emparer du territoire de l’Ukraine, mais de l’autre, le président brésilien a suggéré la semaine dernière que l’Ukraine pouvait céder la Crimée à la Russie. De plus, le Brésil ne participe pas aux sanctions contre Moscou.

Lors de sa visite en Chine, Lula compte présenter à son homologue Xi Jinping son plan de médiation pour la paix en Ukraine. Pour Frédéric Louault (*), professeur de sciences politiques à l’université libre de Bruxelles (ULB), cela s’inscrit dans une tradition diplomatique ancienne du Brésil. « Lula, durant ses premiers mandats, avait noué de bonnes relations avec la Russie, sans complètement tourner le dos aux États-Unis, à l’Union européenne et au bloc occidental », explique-t-il.

« Le Brésil a une position d’intermédiaire qui peut réunir autour d’une même table différents acteurs qui sont fermement opposés les uns aux autres », poursuit le chercheur, qui reconnaît que le pays « ne peut à lui seul assumer une telle ambition ». C’est aussi pour ça que le Brésil a besoin de proposer une solution articulée avec d’autres puissances, notamment la Chine. Si cela fonctionne, et qu’une « position commune sino-brésilienne pouvait permettre de remettre à la même table les différents acteurs du conflit », Brasilia pourrait en sortir grandie sur la scène internationale, estime encore Frédéric Louault.

S’émanciper du dollar

La Chine est le premier partenaire commercial du Brésil, l’économie représente donc un volet important de la visite de Lula en Chine. Le marché chinois représente plus d’un tiers des exportations brésiliennes, soit trois fois plus que les États-Unis. Le Brésil est l’un des rares pays qui vend plus à la Chine qu’elle ne lui achète, grâce notamment au soja ou encore à la viande de bœuf brésilienne.

D’après l’économiste Mylène Gaulard, maîtresse de conférence à l’Université de Grenoble, le Brésil pourrait rejoindre les « nouvelles routes de la soie », ce gigantesque projet chinois d’investissements dans les infrastructures de transport. Les deux pays pourraient aussi s’entendre sur les semi-conducteurs, ces éléments indispensables à la fabrication des puces électroniques, mais dont les États-Unis ont fortement restreint les exportations vers la Chine depuis octobre 2022.

« Le but de la Chine est de devenir indépendante des semi-conducteurs américains et d’en produire à la fois sur le sol national chinois et à l’étranger », explique-t-elle. « La Chine négocie pour pouvoir installer des usines chinoises de semi-conducteurs sur le sol brésilien », précise encore Mylène Gaulard.

Enfin, la Chine et le Brésil ont annoncé fin mars la signature d’un important accord pour échanger entre elles en réais et en yuans, c’est-à-dire pour se passer du dollar. Un pied de nez aux États-Unis, mais aussi une manière de contrer la volatilité du dollar depuis le début de la pandémie de Covid-19, explique l’économiste, et d’éviter les frais de transaction monétaires dans les échanges bilatéraux entre la Chine et le Brésil.

(*) Frédéric Louault, Le Brésil en 100 questions – L’interminable émergence, Tallandier, 2022. (rfi.fr)

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