C’est peu dire que l’attente a été longue pour les Mauritaniens. Près d’une semaine après le scrutin des législatives régionales et municipales, du 13 mai, en Mauritanie, les résultats provisoires des régionales et municipales et du premier tour des législatives sont enfin tombés, ce dimanche 21 mai. Et sans surprise, le parti au pouvoir a remporté une large victoire, qui conforte la position du président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani à un an de la présidentielle. De son côté, l’opposition estime, que cette victoire est entachée par des « fraudes énormes ».
Victoire écrasante pour le parti au pouvoir El Insaf
Ces élections visaient à élire 176 députés, 13 conseils régionaux et 238 conseils municipaux. Le parti El Insaf, du président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani au pouvoir depuis 2019, a remporté 80 sièges de députés, selon les résultats officiels provisoires lus par le président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni), Dah Ould Abdel Jelil.
Une dizaine de formations membres de la mouvance présidentielle en ont obtenu 36, et l’opposition 24, dont 9 pour sa principale formation, le mouvement islamiste Tewassoul.
Un deuxième tour est prévu le 27 mai pour pourvoir 36 postes de députés de la nouvelle Assemblée nationale, deux systèmes ayant cours en fonction du type de circonscription.
Le parti au pouvoir, qui contrôle largement l’Assemblée sortante, remporte également les 13 conseils régionaux en jeu et gagne dans 165 communes sur 238. Le reste des communes se partage entre des partis de la majorité présidentielle et l’opposition.
La participation s’est établie à 71,8 % pour ces élections auxquelles ont participé 25 formations politiques. Les chiffres totaux officiels doivent être validés par la Cour suprême.
Le parti El Insaf était le seul à présenter des candidats dans toutes les circonscriptions. Ses principaux challengers étaient le mouvement islamiste Tewassoul et le parti Sawab, d’obédience nationaliste arabe, qui profite d’une alliance avec le militant anti-esclavagiste Biram Dah Abeid, deuxième de la dernière présidentielle, dont la formation n’est pas autorisée.
Un scrutin très décrié par les partis d’opposition
Les partis de l’opposition ont dénoncé des « fraudes énormes » le 13 mai, lors d’un point de presse vendredi. Ils ont prévu de manifester cette semaine pour les dénoncer et exiger la reprise du vote à Nouakchott et Boutilimit, localité située à 150 km à l’est de la capitale.
Une dizaine de partis de la majorité présidentielle ont également dénoncé des « manquements et des faiblesses notoires (dans le fonctionnement) de la Céni » et réclamé une reprise du vote dans tout le pays, lors d’une rencontre avec la presse jeudi.
Le président de la Céni a lui salué la participation « massive du peuple mauritanien dans le calme et la discipline », lors du vote.
La Céni « partage avec la classe politique la volonté et l’ambition ferme d’organiser des élections sans griefs », a-t-il dit, en évoquant « les difficultés énormes auxquelles elle a dû faire face dans la tenue » de ce triple scrutin.
La campagne s’était déroulée dans un climat apaisé. Un dialogue entre l’opposition et le pouvoir en début d’année avait permis d’aboutir à un consensus sur l’organisation des scrutins.
En route vers un second mandat ?
Les présidents mauritaniens ont toujours eu une forte majorité à l’Assemblée depuis l’instauration du multipartisme en 1991. L’actuel président Ghazouani, 66 ans, s’est gardé de s’exprimer sur l’éventualité de briguer un second mandat. Mais sa candidature est considérée comme une évidence en Mauritanie. « El Insaf va sécuriser une majorité dans toutes les élections et le président Ghazouani va renforcer ses chances d’être réélu en 2024 », estimait, avant les scrutins, Adam Hilelly, analyste au sein de 14 North Strategies, entreprise américaine de conseils spécialisée sur l’Afrique.
Après un ralentissement économique dû à la pandémie de Covid-19 puis la guerre en Ukraine, M. Ghazouani s’est fixé la lutte contre la pauvreté comme l’une de ses priorités. La hausse du coût de la vie est l’une des préoccupations principales des électeurs. Les élections du 13 mai étaient les premières depuis que Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani a pris en 2019 la tête de ce vaste pays d’Afrique de l’Ouest reconnu comme l’un des rares pôles de stabilité au Sahel, région troublée par les attaques djihadistes. (Le Point Afrique)