lundi, novembre 25, 2024
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Au SAHEL, l’hostilité contre les soldats de Barkhane monte d’un cran

On pourrait le surnommer « le convoi de l’enfer ». La colonne de ravitaillement de l’armée française à travers le Sahel a enfin rejoint son objectif dimanche, après avoir été arrêtée deux fois par de violentes manifestations. Cet exemple illustre la défiance croissante d’une partie de la population face la présence militaire française au Sahel depuis quelques mois. Un ressentiment qui pourrait encore grandir alors que le journal Libération publie ce vendredi des témoignages de manifestants nigériens accusant les soldats français d’avoir ouvert le feu sur des civils. L’incident se serait produit le 27 novembre à Téra au Niger. Le convoi de l’armée française – 80 véhicules escortés par une centaine de militaires – qui avait déjà été arrêté une première fois huit jours plus tôt au Burkina Faso, s’est retrouvé face à une foule de manifestants hostiles. « On était face à face », décrit Fayçal Hamadou, un manifestant nigérien de 29 ans joint par téléphone par

Libération. « Au début, ils ont utilisé des gaz lacrymogènes, ça a duré plusieurs heures, en discontinu. Puis, avant 11 heures, (…) les soldats se sont rassemblés et ont ouvert le feu », raconte-t-il. « Les Français tiraient à balles réelles, je l’ai vu de mes propres yeux », confirme Ali Issif, dont le fils a été blessé ce matin-là, également par téléphone. L’incident a fait trois morts selon le dernier bilan du ministère de l’Intérieur nigérien. Cette information est démentie dans les colonnes du quotidien par le colonel Pascal Ianni, porte-parole de l’état-major des armées. « Il y avait une vraie inquiétude pour la vie des gens dans le convoi », décrit-il, évoquant « des tirs de semonce au sol » et seulement « deux blessés » ayant été pris en charge. Un palier franchi Avec cet épisode, l’hostilité à la force Barkhane, qui combat les djihadistes présents au Sahel depuis 2014, a franchi un palier alors que l’image de la France dans la zone s’est clairement détériorée cette année. « Ces incidents, en particulier la première manifestation qui a bloqué le convoi à Kaya (Burkina Faso), ont été très médiatisés », confirme au Parisien Elie Tenenbaum, directeur des études de sécurité à l’Institut français des Relations internationales (IFRI) et spécialiste de l’Afrique subsaharienne. « Ils font suite à une montée des tensions cette année », ajoute-t-il. Mais c’est la première fois, selon plusieurs observateurs du conflit, que la contestation de la présence française est aussi évidente dans les zones affectées par le conflit. Auparavant, les manifestations anti-françaises étaient cantonnées aux capitales, Bamako et Ouagadougou en tête, lieux où les soldats de Barkhane sont peu présents. Ce sentiment prend donc de l’ampleur dans un contexte de recrudescence d’attaques de l’État islamique au grand Sahara, l’un des deux groupes djihadistes actifs dans la région. Quatre soldats burkinabés ont encore été tués dimanche dans le Nord. Fake news et ingérence étrangère Mais pour Elie Tenenbaum, le « fond du problème » reste qu’une partie de la population civile « comprend mal les objectifs et les résultats de l’opération Barkhane ». À Téra, les heurts entre militaires français et manifestants ont éclaté car ces derniers cherchaient à « vérifier ce que les Français transportaient dans leurs camions » après avoir entendu que les soldats de Barkhane « donnaient des armes aux djihadistes », selon les témoins interrogés par Libération. « Malgré huit ans d’action, les terroristes courent toujours et une petite musique s’est composée sur les réseaux sociaux et dans la presse locale, affirmant que la France aide les djihadistes car elle en a besoin pour maintenir sa présence en Afrique de l’ouest », explique Elie Tenenbaum. Or ce discours commence même à gagner les sphères du pouvoir. Le Premier ministre malien Choguel Kokalla Maïga, n’hésitait pas récemment à accuser la France de « former des groupes djihadistes ». « Jusque-là ce type de propos émanait de réseaux pas très crédibles, de cercles complotistes, mais que cela provienne d’une autorité aussi haute que le Premier ministre y donne du crédit », estime Boubacar Haidara, chercheur malien. Un constat inquiétant pour l’armée française, qui doit également faire face à l’ingérence de plus en plus forte de puissances étrangères dans la zone, et notamment la Russie à travers ses mercenaires de la force Wagner. (Le Parisien)

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