Considéré comme un des pionniers du djihadisme français parti en Syrie en 2012, l’homme âgé aujourd’hui de 29 ans s’était rendu aux autorités turques en 2016, avec ses quatre femmes. Tous les cinq sont poursuivis pour « participation à une association de malfaiteurs terroriste en vue de la préparation d’un crime d’atteinte aux personnes » et encourent trente ans de réclusion. Leur procès s’ouvre ce lundi 14 mars 2022 à Paris.
Il était inscrit sur la liste des terroristes français recherchés par Interpol. Kevin Guiavarch, 29 ans, parti combattre en zone irako-syrienne en 2012, un an et demi avant que l’État islamique (EI) proclame le califat, est accusé d’avoir été un recruteur du groupe djihadiste. Celui qui se dit « repenti » est jugé à partir de ce lundi 14 mars 2022 par la Cour d’assises spéciale de Paris avec ses quatre « épouses ».
C’est avec ces dernières et leurs six enfants qu’il avait quitté la Syrie en juin 2016 pour se rendre en Turquie où ils ont été interpellés. Dans une lettre aux autorités françaises, il affirmait alors avoir pris ses distances avec l’EI depuis deux ans. Les femmes ont été expulsées vers l’Hexagone durant l’automne 2016 et écrouées pour trois d’entre elles, tandis que les enfants, dont certains nés en Syrie, ont été placés. Kevin Guiavarch a, lui, été remis à la France en janvier 2017, mis en examen aussitôt et incarcéré.
Il se serait radicalisé vers 16 ans
Poursuivis pour « participation à une association de malfaiteurs terroriste en vue de la préparation d’un crime d’atteinte aux personnes », tous les cinq encourent trente ans de réclusion criminelle. Trois des femmes comparaissent libres, sous contrôle judiciaire. À leurs côtés, se tiendra une sixième personne, Camélia M., poursuivie pour « financement d’entreprise terroriste ». Elle est accusée d’avoir cherché à faciliter le départ en Syrie d’une mineure de Troyes (Aube) en lui payant un billet d’avion et en lui fournissant sa carte bancaire. Une fois en Syrie, cette mineure aurait dû épouser Kevin Guiavarch.
L’accusé, né d’un père Breton, a été élevé par sa mère, d’abord à Paris. Converti à l’islam à l’âge de 13 ans, il se serait radicalisé trois ans plus tard, lors de l’installation de la famille à Grenoble en 2009. Après un premier mariage et la naissance d’un premier enfant, il épouse en avril 2012, Salma O., de douze ans son aînée. Le couple s’est envolé au mois de décembre suivant vers la Syrie.
Il « participe à la prise de Mossoul », selon l’accusation
Il rejoint alors les rangs du Front Al-Nosra, branche syrienne d’Al-Qaida, avant d’intégrer l’organisation État islamique, pour laquelle le djihadiste, devenu Abou Ayoub, « participe à des combats » et des « tours de garde », selon l’accusation. De nombreux clichés le montrent en tenue de combat et en possession d’armes de guerre. Kevin Guiavarch était « au cœur d’une mouvance djihadiste combattante particulièrement brutale, du moins au cours des premiers mois de l’année 2014 ».
L’accusé conteste cette version, affirmant avoir été brancardier, infirmier ou encore agent de la circulation. Au cours de ses auditions, il a assuré jouer « un jeu de rôle » auprès de l’EI et qu’il songeait à déserter ses rangs dès 2014. Kevin Guiavarch a également prétendu avoir été traumatisé par un de ses premiers combats à Raqqa, en 2013, assurant « n’avoir jamais participé à d’autres, ni commis d’exactions ». L’accusation soutient au contraire qu’il a participé à la prise de Mossoul en Irak en juin 2014, ce qu’il nie.
Avec sa femme, ils recrutent plusieurs autres femmes qui les rejoignent, parfois avec leurs enfants, et dont certaines deviennent ses épouses. Outre Salma O., Kevin Guiavarch se marie avec Parveen L. (née en 1994), puis Sally D. (1990) et enfin Sahra R. (1994), toutes originaires de France et recrutées depuis la Syrie via un compte Facebook. Elles comparaissent avec lui devant la cour d’assises.
Le procès est prévu jusqu’au 25 mars. (Ouest France)