Blaise Compaoré a été condamné ce mercredi (06.04) par contumace à la prison à vie par le tribunal militaire de Ouagadougou.
L’ancien président du Burkina Faso, qui vit en exil à Abidjan, est reconnu coupable d’avoir participé à l’assassinat de son prédécesseur en 1987.
L’autre grand absent de ce procès, Hyacinthe Kafando, l’ancien commandant de la garde de Blaise Compaoré, a également été condamné à la perpétuité.
Enfin, présent lors des audiences, le général Gilbert Diendéré, l’un des principaux chefs de l’armée lors du putsch de 1987, écope également de la prison à vie.
L’émotion de Mariam Sankara
Thomas Sankara, leader de la révolution burkinabè et douze de ses collaborateurs ont été assassinés le 15 octobre 1987, alors qu’ils étaient réunis à Ouagadougou. Réouvert au lendemain d’une insurrection qui a entrainé la chute de Blaise Compaoré, ce procès fera date dans l’histoire politique du Burkina Faso.
Ce verdict est ainsi un grand jour pour Mariam Sankara. Pour la veuve de Thomas Sankara, « l’opinion publique sait maintenant qui est le président Thomas Sankara, qui est l’individu, qui est l’homme politique et ce qu’il voulait. Mais aussi ce que voulaient ceux qui l’ont assassiné. On l’avait traité de tout dans les discours. »
Douze des quatorze accusés étaient présents à la barre. Ils étaient accusés de complicité d’assassinat, d’assassinat, de recel de cadavres et d’attentat à la sureté de l’Etat.
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Maître Mathieu Somé, l’un des avocats du général Gilbert Diendéré, déplore que la justice n’ait pas pris en compte le fait que son client a coopéré avec la justice.
« Elle est excessive de mon point de vue. Il a pris la même peine que ceux qui étaient absents. J’ai trouvé cela, sans rentrer dans les détails, pas tout à fait juste. Il est venu quand même apporter sa contribution en s’expliquant devant le peuple », explique l’avocat.
Être allé au bout du procès
Au-delà des peines prononcées, le plus important était d’établir la vérité devant la justice, explique maître Prosper Farama, avocat de la partie civile :
« Les familles n’étaient pas accrochées sur les peines à donner à qui que ce soit. Les familles voulaient la vérité, la justice. Les peines relevaient de la souveraineté des juges. Ils ont prononcé les peines en estimant que pour certains il n’y avait pas de circonstances atténuantes. Ce qui nous intéressait est d’aboutir à un verdict qui nous rende justice, de conduire ce procès jusqu’à son terme, que les accusés aient eu la possibilité de se défendre à l’exception de ceux qui n’ont pas eu le courage et l’honnêteté de faire face à la justice de leur pays. »
Alouna Traoré, l’un des rescapés du putsch du 15 octobre, a le sourire au sortir de la salle d’audience.
Le rêve burkinabè est permis, estime-t-il. Pour Alouna Traoré, « ils ont attaqué notre rêve pensant pouvoir le tuer. 35 ans après, je me rends compte que le rêve burkinabè tient la route. Cela enthousiasme tout le continent, les lignes sont en train de bouger. Thomas a fait œuvre utile, son exemple est en train d’être suivi. Notre joie c’est que les jeunesses, les générations futures s’en servent pour des combats meilleurs, pour qu’on puisse faire de ces territoires dits de misère et de précarité, des territoires de bonheur et de bien-être. »
Un combat qui ne fait que commencer
Le dossier Thomas Sankara n’est pas, pour autant, totalement bouclé. Il peut toujours connaître des rebondissements.
Au-delà de la possibilité de faire appel de ce jugement, Maître Propser Farama note qu’un « volet international est toujours en cours. Nous attendons qu’un juge soit nommé. Enfin, le combat pour la justice et la vérité ne s’arrête jamais à un procès. Pendant que nous luttons tous les jours pour que ces choses n’arrivent pas, vous apercevrez que nous ne sommes pas très loin du recommencement de ces événements malheureux. C’est un combat continuel qui ne s’arrête jamais, pas pour les avocats, mais pour tout le peuple burkinabè. »
Le tribunal militaire a par ailleurs prononcé la déchéance des décorations de tous les accusés condamnés.
Auteur: Richard Tiéné