Alors que l’ancien parti unique est toujours dirigé par l’ancien président de 88 ans, certains représentants de la jeune génération s’inquiètent publiquement de sa capacité à remporter les prochaines échéances électorales.
« Est-ce que les militants ne servent qu’à payer des cotisations et à organiser les réunions ? Est-ce que la jeunesse sert seulement à soulever des bâches et des chaises lors des meetings ou à être instrumentalisée dans d’absurdes guerres internes ? » Des jeunes militants du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) se posent des questions et, cette fois, ils le font haut et fort.
Ces derniers temps, sur les réseaux sociaux ou dans la presse ivoirienne, ils multiplient les prises de position, regrettant de ne pas être écoutés ou reçus par les instances dirigeantes du parti d’opposition, dirigé par l’ancien président Henri Konan Bédié, malgré leurs sollicitations. « Ce n’est pas facile de se faire entendre dans un parti comme le PDCI », résume Franck Medard Kouassi, secrétaire général du mouvement “Marée verte” qui revendique entre 4 000 et 5 000 adhérents et dont l’objectif depuis son lancement en 2020 est de faire vivre le plus vieux parti ivoirien sur les réseaux sociaux afin d’en « rafraîchir l’image avec une communication plus moderne ».
« Parti réfractaire au débat et à la contradiction », « folklore du culte de la personnalité », « pas de vision », délégations « en hibernation », absence de mobilisation de terrain, lutte interne des cadres du parti, les griefs sont nombreux à en croire tous ceux, membres de “Marée verte” ou non, qui osent s’exprimer publiquement.
Ambition
« Nous sommes inquiets pour l’avenir de notre parti qui, je le rappelle, est dans l’opposition depuis 23 ans. Comment remporter les élections locales de 2023 et surtout la présidentielle de 2025 sans stratégie et sans impliquer les jeunes ? Nous demandons qu’un bilan soit tiré pour identifier ce qui ne marche pas et avancer. Notre ambition est de gouverner, le président Bédié doit se saisir du problème », poursuit Franck Medard Kouassi. Ce dernier espère que le congrès du parti, repoussé à de multiples reprises, se tiendra cette année et qu’au bout un candidat consensuel sera désigné. Et si ce doit être l’ancien président de 88 ans, comme en 2020, les jeunes suivront, assure Franck Medard Kouassi.
Cette demande d’un examen de conscience n’est pas nouvelle. Depuis l’échec de la stratégie du parti lors de l’élection présidentielle d’octobre 2020 et malgré des ajustements dans l’organisation de la formation politique, les récriminations, à bas bruit, sont constantes.
Manipulation
« Ces reproches sont le fait d’une poignée de jeunes manipulés. Sinon, pourquoi cette action coordonnée sur les réseaux sociaux, du jour au lendemain ?» s’interroge un haut cadre du parti. Une manipulation qui serait d’après lui orchestré par des mécontents des changements intervenus à la tête du PDCI l’année dernière. « Il n’y a pas péril en la demeure, nous sommes zen », assure-t-il.
Il rappelle les propos de Valentin Kouassi, le président de la jeunesse du PDCI (JPDCI Urbaine), un des organes officiels des jeunes du parti, qui dans une interview récente à Ivoir’hebdo refusait lui aussi de parler « de colère et encore moins de grogne », même s’il évoquait quelques jours plus tôt « des discordes » .
En réponse, Franck Medard Kouassi réfute toute forme de manipulation, malgré des rumeurs de proximité avec Jean-Louis Billon qui avait, un temps, fait part de son souhait d’être candidat à la présidentielle au nom du PDCI. « J’ai lu ça mais c’est complétement faux. Nous travaillons sur fonds propres, nous ne sommes affiliés à personne ».
Le PDCI dit attendre la fin des obsèques du frère aîné du président, décédé en août dernier, qui se dérouleront à Daoukro du 28 mai au 5 juin, pour convoquer un bureau politique afin de fixer la date du congrès et mettre les choses à plat. Après avoir passé trois mois dans sa région natale, Henri Konan Bédié a retrouvé sa résidence d’Abidjan le 17 juin, accueilli notamment par son directeur de cabinet, Bernard Ehouman et le secrétaire exécutif adjoint du parti, Georges Philippe Ezaley. Et si certains y ont vu un retour précipité en raison de la grogne, son entourage assure qu’au contraire, il était tout à fait prévu. (jeuneafrique)