La mobilisation contre la réforme des retraites est restée très forte jeudi en France. Une semaine après le passage en force du gouvernement sur ce texte, la radicalisation du mouvement s’est traduite par une hausse des violences.
Au total, 3,5 millions de personnes ont manifesté dans plus de 300 villes de France, selon le syndicat CGT, et 1,08 million selon le ministère de l’Intérieur. Une mobilisation massive pour cette 9e journée d’action, mais la première depuis que le gouvernement a utilisé une disposition constitutionnelle, le 49.3.
Les manifestations ont aussi connu un regain de tensions dans plusieurs villes de France. Sporadiques depuis le début de la mobilisation le 19 janvier, les violences ont ressurgi parfois spectaculairement, monopolisant à nouveau l’antenne des chaînes de télévision et ravivant les souvenirs du mouvement populaire des « gilets jaunes ».
Selon le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, 123 gendarmes et policiers ont été blessés au cours des incidents et plus de 80 personnes interpellées. Face à la montée de la radicalisation, il avait annoncé la mobilisation de 12 000 policiers et gendarmes jeudi, dont 5 000 à Paris. Dans la soirée, Gérald Darmanin, a dénoncé la violence de « casseurs » issus de « l’extrême gauche ». La Première ministre Elisabeth Borne a jugé jeudi soir « inacceptables » les « violences et dégradations » dans ces manifestations.
Une situation explosive dû à Emmanuel Macron, selon Philippe Martinez
Peu avant le départ de la manifestation parisienne, le secrétaire général du syndicat modéré CFDT, Laurent Berger, avait appelé « à la non-violence ». Son homologue de la CGT Philippe Martinez avait estimé de son côté qu’Emmanuel Macron avait « jeté un bidon d’essence sur le feu », rappelant que les syndicats lui avaient écrit pour l’alerter sur la « situation explosive » du pays.
À Paris, des violences ont éclaté en tête de la manifestation avec son lot de vitrines brisées et de mobilier urbain détruit à rebours d’un cortège où la grande majorité des manifestants a défilé pacifiquement. Tout au long du défilé, plusieurs supérettes, fast-food et banques, selon les journalistes de l’AFP. Des incidents étaient toujours en cours en début de soirée, avec notamment des poubelles et des kiosques à journaux incendiés.
À Rouen (nord-ouest), une manifestante d’une trentaine d’années, qui travaille avec des enfants handicapés, a eu un pouce arraché, selon une députée de La France Insoumise, Alma Dufour, qui met en cause l’usage d’une grenade de désencerclement par les forces de l’ordre.
À Nantes, des manifestants se sont introduits dans le tribunal administratif, saccageant l’accueil et brisant vitres et portes. Plusieurs commerces ont été dégradés. À Lorient, le commissariat et les forces de l’ordre a été pris pour cibles par des manifestants, en grande partie des jeunes au visage dissimulé. Des vitres du bâtiment ont été cassées par des jets de projectiles.
À Rennes, au lendemain d’une journée de heurts entre marins-pêcheurs et forces de l’ordre, des tirs de grenades lacrymogènes ont répondu aux jets de projectiles et feux de poubelles, plongeant le cortège de l’intersyndicale, pris en étau, dans un épais nuage de fumée âcre. La maire Nathalie Appéré s’est émue de « scènes de chaos ».
À Bordeaux, la porte de l’Hôtel de ville a été incendiée. Le feu a été rapidement maîtrisé et éteint par les pompiers. Les dégâts semblent se limiter à l’entrée du bâtiment. (rfi.fr)