Les Ghanéens sont appelés aux urnes, lundi, pour les élections législatives et présidentielle. Ils devront départager le président sortant, Nana Akufo-Addo, de son rival de toujours, John Mahama. C’est la troisième fois en 10 ans que la présidentielle oppose les deux hommes.
Le Ghana, exemple de démocratie en Afrique de l’Ouest, se prépare à choisir, lundi 7 décembre, son président dans un scrutin qui s’annonce serré entre deux adversaires politiques de longue date. Ces derniers se sont engagés, vendredi, à ne promouvoir aucune violence lors du vote et à la proclamation des résultats.
Le président Nana Akufo-Addo, 76 ans, candidat pour le Nouveau parti patriotique (NPP), brigue un second mandat face à son prédécesseur John Mahama, 62 ans, leader de l’opposition, du Congrès national démocratique (NDC).
Dans les rues d’Accra, vendredi, seuls les drapeaux miniatures des principaux partis accrochés à des lampadaires rappelaient la tenue de scrutins présidentiel et législatif dans moins de 72 heures. Les tee-shirts à l’effigie des candidats, habituellement portés en période électorale, sont restés rangés à la maison. Pas de grand meeting ou d’animation, les militants font du porte à porte, et les électeurs sont encouragés à se rendre aux urnes par SMS.
Déjà-vu
Cette année, la campagne au Ghana a pris une tournure différente à cause de la pandémie de coronavirus et d’une certaine lassitude. Cette élection a comme un air de déjà-vu : en 2012 et en 2016, les deux principaux candidats s’étaient déjà affrontés pour accéder à la magistrature suprême. Chacun remportant de justesse l’un des deux scrutins.
« Cette élection est celle des bilans », affirme Bernard Twum-Ampofo, un fonctionnaire interrogé dans la capitale. « Il faut comparer les bilans des deux principaux candidats (…) et choisir le meilleur. »
L’actuel président « a instauré la gratuité des lycées » et John Mahama « nous a donné les infrastructures », dit-il, précisant ne pas encore avoir fait son choix.
Onze autres candidats, dont trois femmes, sont aussi en lice, mais leurs chances de l’emporter sont minimes, alors que les deux principaux partis dominent la vie politique depuis l’instauration de la démocratie, il y a 28 ans.
« Lundi, j’irai aux urnes, car le Ghana a besoin d’une troisième force, affirme Gifty Inkoom, une étudiante-infirmière. Nous sommes fatigués de la politique du NDC et du NPP. »
Les prétendants devront convaincre les 17 millions d’électeurs ghanéens, dont plus de la moitié a moins de 35 ans.
Le chômage, les infrastructures, l’éducation et la santé sont les principaux enjeux. Depuis les années 2000, ce pays riche en or, cacao et plus récemment pétrole, a connu une forte croissance. Et le taux d’extrême pauvreté a été divisé par deux en moins de vingt-cinq ans. Mais certaines régions, notamment dans le Nord, continuent de vivre dans le plus grand dénuement, sans eau potable ni électricité. Surtout, la crise provoquée par le coronavirus a durement touché le pays, dont la croissance cette année devrait tomber à 0,9 %, selon le FMI, soit le taux le plus bas depuis plus de trente ans.
Le président sortant a été salué pour sa gestion de cette crise, et il a tenu certaines de ses promesses, notamment sur l’éducation et l’accès à l’électricité, mais il a déçu sur son engagement principal : lutter activement contre la corruption.
« Pacte de paix » entre les candidats
En novembre, le procureur spécial anticorruption a démissionné, accusant Nana Akufo-Addo d’obstruction dans son travail.
De son côté, John Mahama devra faire oublier les accusations de mauvaise gestion économique, qui avaient empêché sa réélection. Cette année, il peut toutefois compter sur sa colistière, Jane Naana Opoku-Agyemang, une ancienne ministre de l’Éducation, réputée intègre et originaire du Centre, une région clé pour remporter le scrutin.
Jusqu’ici, le Ghana a toujours échappé aux violences post-électorales, contrairement à plusieurs de ses voisins ouest-africains. La campagne a toutefois été marquée par des accrocs, les opposants accusant notamment la Commission électorale de manque de neutralité.
Le président et son principal opposant ont signé, vendredi, un « pacte de paix » et se sont engagés à ne promouvoir aucune violence lors du vote de lundi et à la proclamation des résultats.
« J’ai confiance dans le processus électoral, et je suis heureux de dire que nous accepterons le souhait du peuple ghanéen », a déclaré le président Nana Akufo-Addo, lors d’une cérémonie symbolique organisée à Accra.
« La paix, l’unité et la sécurité doivent être notre première préoccupation », a-t-il ajouté.
Pour Kojo Asante, du Centre ghanéen pour le développement démocratique, les élections devraient se dérouler dans le calme.
Il souligne également le nombre important d’observateurs internationaux et locaux prévus : « Tout le monde désire que cette élection se déroule bien. Car il y a déjà beaucoup trop de points chauds à gérer dans cette région ». (France24/Afp)