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Christian Poncelet, ancien président du Sénat, est mort

Christian Poncelet, ancien président du Sénat, est mort à l’âge de 92 ans, a annoncé vendredi 11 septembre le maire de Remiremont (Vosges), Jean Hingray, à l’Agence France-Presse. Avec la disparition de ce « dinosaure » de la Ve République s’éteint une espèce d’élus ayant, pendant plus d’un demi-siècle, exercé tous les mandats électifs ou presque de la carrière politique. A lui seul, il aura cumulé cent cinquante années de mandats électifs, un record qui n’est pas près d’être battu.

Il est né le 24 mars 1928 à Blaise, un petit village des Ardennes. Sa mère n’a que 18 ans quand elle le met au monde, son père les quittera quelques mois plus tard. Ayant échoué au brevet, il entre en 1950 aux PTT, où il fait ses premières armes de syndicaliste à la Confédération française des travailleurs chrétiens. Parallèlement, il rejoint les rangs de l’Union démocratique du travail (UDT), fondée en 1959 et considérée comme le « bras social du gaullisme ». Quand, en 1962, le parti gaulliste, l’Union pour la nouvelle République, fusionne avec l’UDT, il se retrouve investi pour les élections législatives dans les Vosges, à Remiremont, et obtient son premier mandat de député.

C’est le début d’une longue carrière politique : dix ans député, cinquante-deux ans conseiller général, dont trente-neuf ans à la présidence du département des Vosges, trente-six ans conseiller municipal, puis premier adjoint et, enfin, maire de Remiremont pendant dix-huit ans, quatorze ans conseiller régional et, même, une éphémère présence, pendant un an, au Parlement européen, avant d’être élu sénateur, en 1977. Il quittera le Sénat trente-sept ans plus tard, après en avoir exercé la présidence pendant dix ans, de 1998 à 2008.

Ténacité et népotisme

Sans oublier les fonctions ministérielles qu’il a occupées de 1972 à 1976, en tant que secrétaire d’Etat, successivement chargé des affaires sociales, de la fonction publique, du budget puis des relations avec le Parlement. Un sacré palmarès, même si c’est au Sénat que Christian Poncelet aura laissé l’empreinte la plus profonde.

Après avoir effectué un premier mandat de neuf ans, Christian Poncelet s’empare en 1986 de la stratégique présidence de la commission des finances du Sénat : un poste clé qui lui permettra de distribuer largement et à discrétion les prébendes de la réserve parlementaire, sur laquelle il avait la haute main. De quoi s’attacher de nombreux obligés. Dès 1992, il s’affirme comme un sérieux prétendant à la succession d’un Alain Poher déclinant à la présidence du Sénat mais, torpillé par ses propres amis du RPR alors présidé par Jacques Chirac, il doit renoncer et c’est le centriste René Monory qui s’installe au Petit Luxembourg.

Christian Poncelet, qui garde la présidence de la commission des finances, rumine ce premier revers, consolide ses réseaux d’amitiés et d’affidés, faisant montre d’une générosité sans pareille notamment lorsqu’en 1998 il se lance de nouveau à l’assaut du « plateau ». Car tout le talent du « monarque des Vosges » réside dans ce cocktail de ténacité, de népotisme et de roublardise qui lui permet de se rendre incontournable. Et de détrôner René Monory sans même se prévaloir de l’investiture du RPR de Jacques Chirac. Ce dernier ne souhaitait pas sa victoire, il doit s’en accommoder.

Avec la présidence du Sénat, Christian Poncelet a obtenu son Graal, son bâton de maréchal. A peine élu par ses pairs, il assure qu’il n’effectuera pas plus de deux mandats de trois ans ; il ne pourra s’empêcher d’en faire trois, jusqu’en 2008, ayant bénéficié d’un allongement d’un an grâce au report des élections sénatoriales. Il promet « une présidence modeste ». Sous son règne, le Sénat mènera grand train.

Souhaitant combler le déficit de communication de la deuxième chambre, le président du Sénat va multiplier les opérations événementielles, dites d’« ouverture à la société civile », en faisant exploser le budget de communication ainsi que les frais de réception et les dépenses de cabinet de la présidence du Sénat. C’est sous la présidence de Christian Poncelet que les grilles du jardin du Luxembourg commencent à accueillir des expositions photographiques grand public, symbolisant à ses yeux l’« art passant ».

Arrangement à l’amiable

Sous sa présidence, également, le Musée du Luxembourg connaît une nouvelle jeunesse et un important succès public, mais les conditions dans lesquelles son exploitation a été confiée à une société privée alimenteront longuement la chronique judiciaire. Les manifestations culturelles n’ayant qu’un lointain rapport avec l’activité législative et de contrôle de l’action du gouvernement du Sénat se multiplient. Christian Poncelet y gagne de la part de ses collègues un surnom : le « seigneur des panneaux ».

Mais, dès 2004, certains commencent à s’inquiéter, jusque dans les rangs de l’UMP, de voir le Sénat se transformer en « entreprise de spectacle » et de la dérive des dépenses de communication. D’autant que plusieurs affaires émergent au grand jour dans lesquelles le nom de Christian Poncelet est associé.

C’est d’abord l’affaire de sa « secrétaire particulière », Marie-Josèphe Aucouturier, sa fidèle collaboratrice depuis 1972 mais qui, pendant vingt-huit ans, aura été rémunérée par les PTT puis par France Télécom. Et, lorsque cette dernière demande une régularisation de la situation, le président du Sénat la congédie sans autre forme de procès. La dame se retourne contre lui ; après deux renvois devant les prud’hommes, le président du Sénat préfère négocier un arrangement à l’amiable.

La fin de présidence de Christian Poncelet s’abîme dans les affaires. Son nom est cité dans deux dossiers judiciaires. Surtout, pour le grand public, c’est l’appartement « à vie » de 200 m2 dans le très huppé 6e arrondissement de Paris qu’il s’est fait accorder par le bureau du Sénat au crépuscule de sa présidence qui symbolisera le régime de privilèges dont bénéficie la seconde chambre du Parlement. L’image du Sénat en sort sérieusement dégradée. Christian Poncelet se retire sans gloire. Il restera sénateur jusqu’en 2014 avant de prendre une retraite politique définitive un an plus tard à l’expiration de son mandat de conseiller général et président du département des Vosges. (LeMonde.fr)

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