vendredi, avril 19, 2024
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CUBA s’apprête à tourner la page de l’ère Castro

La der des ders. Depuis vendredi et jusqu’à lundi, Raúl Castro participe à son dernier congrès du Parti communiste cubain en tant que premier secrétaire. Un rassemblement qui a tous les atours d’un point final à l’ère Castro.

A 89 ans, le premier secrétaire s’apprête à passer définitivement la main à la nouvelle génération n’appartenant plus à celle de la révolution de 1959 pensée et dirigée par son frère, Fidel, décédé en 2016. Il devrait céder son poste au président Miguel Diaz-Canel, âgé de 60 ans.

«Rien n’a été acté. Cela se fait par vote, lors du Congrès. Mais selon toute vraisemblance, ce sera lui», précise Stéphane Witkowski, président du conseil d’orientation stratégique de l’Institut des hautes études sur l’Amérique latine (IHEAL), spécialiste de Cuba, sur France 24.

Un premier pas important vers cette transition avait été fait en 2018 : Raúl Castro avait alors cédé sa place à la présidence du pays à Miguel Diaz-Canel, premier civil à diriger aussi le parti, au sein duquel il a effectué toute sa carrière.

«Satisfaction d’avoir rempli mon rôle»

La date de ce congrès n’a pas été choisie au hasard. Ce rendez-vous historique s’est ouvert 60 ans jour pour jour après la proclamation par Fidel Castro du caractère socialiste de la révolution cubaine, désormais «irréversible» depuis l’adoption d’une nouvelle Constitution en 2019. «En ce qui me concerne, ma tâche […] s’achève, avec la satisfaction d’avoir rempli mon rôle et avec confiance en l’avenir de la patrie», a déclaré Raúl Castro.

Le premier secrétaire ne compte toutefois pas s’effacer. «Que personne n’en doute : tant que je vivrai, je serai prêt, avec le pied sur l’étrier, pour défendre la patrie, la révolution et le socialisme», a-t-il martelé, sous les applaudissements de quelque 300 délégués du parti venus de tout le pays et réunis au Palais des Conventions de La Havane.

«Raúl sera toujours là», assure l’ex-diplomate cubain Carlos Alzugaray auprès de l’AFP. Il analyse : «On pourrait passer à un modèle similaire à ce qui s’est passé en Chine quand Deng Xiaoping n’avait plus aucun poste mais était vivant, donc il fallait le consulter sur tout, il avait le dernier mot».

C’est «le congrès de la continuité», a rappelé le président Miguel Diaz-Canel via Twitter, soulignant ainsi que les lignes directrices du pouvoir à Cuba, l’un des cinq derniers pays communistes au monde, ne changeraient pas. Si des réformes économiques sont urgentes, dans ce pays en profonde crise sous l’effet des sanctions américaines et de la pandémie, le dogme du parti unique sera maintenu.

«Raúl sera là, il n’est pas mort»

Avec Raúl Castro, devraient aussi partir en retraite certains des grands noms de la génération historique – ceux qui ont fait la révolution de 1959 -, dont le numéro deux du parti, José Ramon Machado Ventura, 90 ans, et le commandant Ramiro Valdés, 88 ans. «Le parti constitue la garantie de l’unité nationale», a déclaré José Ramon Machado Ventura en inaugurant le congrès «avec la conviction que nous continuerons à être fidèles à l’héritage de nos martyrs et à l’exemple de Fidel et Raúl».

Après la mort de Fidel en 2016, le départ de Raúl tourne une page historique pour l’île et ses habitants, dont presque tous n’ont jamais connu d’autre famille dirigeante. «Raúl ne va plus être à la tête du parti, mais en cas de problème Raúl sera là, il n’est pas mort», veut croire Ramon Blande, militant communiste de 84 ans. Dans les rues de La Havane, les Cubains semblent surtout préoccupés par les pénuries alimentaires, les files d’attente face aux magasins et l’inflation vertigineuse provoquée par la récente unification des deux monnaies locales.

«J’espère qu’avec le congrès ça va s’améliorer car les prix sont très élevés, les salaires ont augmenté […] mais ça ne suffit pas», se lamente Maria Martinez, retraitée de 68 ans. Ces derniers mois, Cuba vit une grogne sociale inédite, sous l’impulsion de l’arrivée récente de l’internet mobile, avec plusieurs manifestations de divers secteurs de la société civile.

«Une nouvelle forme de relations avec les Etats-Unis»

Tandis que le frère de Fidel Castro s’apprête à tirer sa révérence, des documents déclassifiés publiés vendredi par le National Security Archive révèlent que la plus ancienne tentative connue de la CIA d’assassiner un leader de la révolution cubaine remonte à 1960, quand un agent a proposé 10 000 dollars au pilote qui ramenait Raúl Castro de Prague vers La Havane pour «arranger un accident».

«Ces documents nous rappellent un chapitre sombre et sinistre des opérations américaines contre la révolution cubaine», a dit à l’AFP un analyste du National Security Archive, Peter Kornbluh. «Au moment où l’ère Castro touche officiellement à sa fin, les politiques américains ont l’opportunité de laisser ce passif derrière eux et de participer à l’avenir post-Castro de Cuba», a-t-il ajouté.

Raúl Castro a d’ailleurs affirmé dans son discours de vendredi «la volonté de nouer un dialogue respectueux, une nouvelle forme de relations avec les Etats-Unis sans prétendre que, pour y arriver, Cuba renonce aux principes de la révolution et du socialisme».

Les relations entre Cuba et les Etats-Unis, après une détente historique mais éphémère entre 2014 et 2016, se sont à nouveau tendues sous l’administration de Donald Trump, qui a durement renforcé l’embargo en vigueur depuis 1962.

De son côté, Joe Biden, qui avait promis en campagne de revenir sur certaines sanctions, n’a pas dit un mot sur l’île depuis son investiture. «L’objectif de ces mesures est d’étendre le siège économique» sur Cuba, «avec comme but déclaré d’étrangler le pays et de provoquer une explosion sociale», a dénoncé Raúl Castro, fustigeant cette «guerre économique». (Libération)

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