a présidence russe a minimisé jeudi l’importance des rassemblements de la veille en soutien à l’opposant emprisonné et en grève de la faim Alexeï Navalny, qui se sont soldés par près de 1.800 interpellations à travers la Russie.
« Nous ne voyons pas de raison valable de commenter », a estimé le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, ajoutant que « dans l’ensemble, ces actions étaient hors-la-loi car elles n’avaient pas été autorisées ».
Pour lui, « le principal évènement d’hier » était le discours à la nation de Vladimir Poutine.
Des milliers de manifestants se sont réunis mercredi soir à l’appel des soutiens de M. Navalny, en grève de la faim depuis le 31 mars pour dénoncer ses conditions de détention et dont l’état de santé inquiète vivement ses partisans.
Ces derniers avaient appelé à des rassemblements dans une centaine de villes, le jour du discours de M. Poutine.
Lors de cette prise de parole très attendue, le président russe a mis en garde ses rivaux étrangers sur une riposte « dure » s’ils s’en prenaient à Moscou, sur fond de tensions croissantes avec l’Occident autour de l’affaire Navalny et de l’Ukraine.
Sans surprise, il n’a pas évoqué le sort de l’opposant, dont il ne prononce jamais le nom.
La mobilisation des partisans de l’opposition jeudi était néanmoins moindre que lors des journées d’action qui ont suivi l’arrestation de M. Navalny en début d’année, et la réaction policière nettement moins brutale, à Moscou en particulier.
Selon l’ONG spécialisée OVD-Info, une large part des quelque 1.800 interpellations — 806 personnes — a eu lieu à Saint-Pétersbourg, où des violences policières ont été signalées.
A Moscou, les manifestants, réunis dans différents cortèges, ont pu défiler près du Kremlin puis du siège des services de sécurité (FSB) sans que les forces antiémeute n’interviennent. Au moins 30 personnes y ont été interpellées, selon OVD-Info.
Des interpellations ont également eu lieu dans 96 autres villes dans toute la Russie, selon OVD-Info, principalement à Oufa (119), Kazan (68) et Barnaoul (58).
« Acharnement insupportable »
Réagissant aux manifestations, le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a dénoncé jeudi un « acharnement insupportable » contre M. Navalny et ses partisans.
Si l’opposant meurt en prison, « on prendra les sanctions nécessaires et on mettra (…) ce drame sous la responsabilité de M. Poutine et des autorités russes », a-t-il ajouté.
Alexeï Navalny a été arrêté sitôt rentré d’Allemagne en janvier, après cinq mois de convalescence pour se remettre d’un empoisonnement pour lequel il accuse directement Vladimir Poutine.
Fin février, il a été condamné à une peine de deux ans et demi de prison pour une affaire de fraude remontant à 2014, qu’il dénonce comme politique.
Alors qu’il est en grève de la faim depuis 23 jours, ses soutiens ont tiré ces derniers jours la sonnette d’alarme, estimant que l’opposant, « très faible », pouvait mourir en détention.
Dimanche soir, il a été transféré dans une unité hospitalière d’un camp pénitentiaire, à une centaine de kilomètres de Moscou.
Alors que l’Occident réclame sa libération et la vérité sur son empoisonnement en août 2020, un groupe d’experts de l’ONU a affirmé mercredi qu’il se trouvait « en grave danger ».
Pour sa part, Tatiana Moskalkova, la déléguée aux droits de l’Homme auprès du Kremlin, a estimé qu’aucun mauvais traitement à l’égard du militant « n’avait été établi » depuis le début de sa détention.
« Les conditions de détention et l’assistance médicale de M. Navalny correspondent à la loi russe et aux normes internationales », a-t-elle ajouté dans une lettre, publiée jeudi, en réponse à une demande d’informations du Conseil de l’Europe.
Alexeï Navalny avait précédemment affirmé subir notamment une « torture par privation de sommeil » en étant réveillé la nuit toutes les heures par ses geôliers. Il se plaint aussi de douleur au dos et de perte de sensibilité des membres. (Le Point)