Au Tchad, la question des désengagés de Boko Haram était au cœur d’une conférence le 7 décembre au Centre d’études pour le développement et la prévention de l’extrémisme (CEDPE) à Ndjamena. Depuis la mort d’Abubakar Shekau, le chef historique de Boko Haram, au mois de mai dernier, les insurgés semblent perdre du terrain au Tchad alors que des affrontements les opposent à l’Iswap (État islamique en Afrique de l’ouest) du côté du Nigeria. Résultat, des centaines de jeunes Tchadiens reviennent dans leur village d’origine après avoir combattu dans les rangs du groupe terroriste.
Quatre mois sans attaque de Boko Haram dans la province du Lac Tchad (la dernière grave attaque ayant eu lieu début août NDLR), c’est bien la preuve que les insurgés perdent du terrain pour Mamadou Souleymane, spécialiste de l’extrémisme violent qui revient tout juste d’une mission de terrain. « Boko Haram commence à perdre du terrain, nous confirme t-il. Cela veut dire que ceux qui étaient engagés dans Boko Haram reviennent clandestinement sans se présenter aux autorités.
Ils reviennent et s’installent dans leur village. C’est très dangereux pour la communauté. Cela crée une psychose. La famille ne les dénonce pas mais si une personne de la communauté veut le dénoncer, cette personne a peur. Elle se dit : « le criminel est parti chez Boko Haram et est revenu et si je le dénonce, il va m’attaquer la nuit et repartir encore. » »
En théorie, les autorités auditionnent ces anciens combattants de Boko Haram. Objectif : déterminer ceux qui ont commis des crimes et qui doivent être poursuivis en justice et ceux, enrôlés de force, qui peuvent rentrer chez eux.
Le travail, la clé de la réinsertion
Reste la question de la réinsertion. Pour Ibrahim Mosso Youssouf, vice-président du Centre pour la prévention de l’extrémisme (CEDPE), c’est clair : « il faut que les États se réveillent pour pouvoir prendre en charge la population et leur créer de l’emploi. Qu’est-ce qui motive les gens à aller avec Boko Haram ? C’est parce que quelque part, ils n’ont pas de travail. Ils sont un peu délaissés et si l’on n’arrive pas à les insérer, il y a ce risque qu’ils peuvent repartir. »
En 2019, le Centre de prévention de l’extrémisme avait évalué à près de 2600 le nombre de jeunes désengagés de Boko Haram. (rfi.fr)