mardi, mai 21, 2024
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ALLEMAGNE. Perpétuité pour un tortionnaire du régime syrien

Des cris de joie ont fusé à la sortie de la haute cour régionale de Coblence, dans l’ouest de l’Allemagne, et des sourires satisfaits ont éclairé les visages des nombreux activistes syriens et défenseurs des droits de l’homme, des témoins et de leurs familles, qui étaient venus assister à un verdict historique. La justice allemande a prononcé une peine de prison à perpétuité à l’encontre d’Anouar Raslan, 58 ans, un ancien colonel de l’armée syrienne, condamné pour crimes contre l’humanité.

« La vérité est rétablie, ce verdict est historique, car il montre que tous les rapports d’ONG et toutes les alertes que nous avons relayées sont vraies. Maintenant, c’est une décision de justice qui le confirme. C’est très important », a déclaré, à la sortie du tribunal, Mazen Darwish, défenseur des droits de l’homme et directeur du Centre syrien des médias (SCM), une ONG basée à Paris, qui a déposé en septembre dernier son témoignage contre Raslan. Environ 80 témoins ont défilé devant la cour ces derniers mois.

Le condamné, dont le visage est resté inexpressif à l’énoncé du verdict, était responsable de la sinistre branche 251 des services de sécurité syriens, installée dans la banlieue de Damas et également connue sous le nom de division « Al-Khatib », est accusé d’avoir supervisé la torture et les sévices de toutes sortes sur plus de 4 000 détenus, entre le début de la révolution syrienne en 2011 et septembre 2012. Au moins 58 personnes auraient succombé aux mauvais traitements infligés dans cette prison secrète.

« C’est incroyable, c’est le premier jugement de ce type au monde, je suis tellement reconnaissant, s’enthousiasme Omar al-Shogre, survivant des centres de détention du régime syrien, réfugié en Suède. Bien sûr, cela ne va pas réparer les blessures ni faire revenir les proches qui ont disparu des familles. Mais cela donne de l’espoir aux Syriens, cela ouvre une porte. Les témoins sont tous sains et saufs. D’autres vont maintenant se manifester. Cela montre que les Syriens peuvent faire confiance à la justice en Allemagne », estime ce jeune activiste devenu l’un des porte-voix des victimes de la torture.

Anouar Raslan, officier de renseignement du régime syrien pendant plus de 18 ans, avait fait défection en 2012 et s’était exilé en Allemagne en 2014. Là, il avait été reconnu par Anouar al-Bouni, un avocat et défenseur des droits de l’homme qu’il avait fait arrêter en 2006 à Damas. « Je suis très heureux, c’est une victoire pour la justice, pour les victimes qui sont ici comme pour celles qui sont encore en prison en Syrie ou qui ont été tuées », réagit Al-Bouni, présent à Coblence pour assister à cette journée historique. « Ce n’est pas uniquement Raslan qui a été mis en cause. Il a été condamné comme l’élément d’une machine de mort, sous l’autorité d’Assad, père et fils », souligne l’avocat.

En 2017, une ONG allemande, le Centre européen pour les droits humains et constitutionnels (ECCHR), avait déposé une plainte auprès du procureur fédéral allemand.

Avec la condamnation en février 2021 d’Eyad al-Gharib, un autre officier de renseignements subalterne de Raslan, cette condamnation à perpétuité est la première prononcée en Europe à l’encontre d’un criminel de guerre syrien, au titre de la « compétence universelle », qui permet à la justice allemande de se saisir de crimes commis hors de son territoire. Le verdict, espèrent les activistes syriens qui ont suivi ce procès pendant de longues semaines, pourrait en appeler d’autres. « D’autres pays vont pouvoir suivre l’Allemagne, comme la Suède, la France? » veut croire Omar Al-Shogre. L’objectif reste, pour lui, de traduire devant la justice le président syrien Bachar al-Assad.

« Les Syriens n’attendent rien d’autre que de l’espoir, poursuit-il. À Damas, les gens m’envoient des messages de félicitations, des réactions joyeuses. Aujourd’hui je souris beaucoup. »

Anouar al-Bouni est déjà tourné vers les prochains procès contre des suspects de crimes de guerre en Syrie. Jeudi prochain, à Francfort, se tiendra celui d’un médecin, Alaa Moussa, accusé de crimes contre l’humanité. (Le Point)

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