La brève interpellation du président du MPP, dimanche 27 mars, fait craindre une chasse aux sorcières parmi les caciques de l’ancien régime. Et renforce les divisions au sein de la formation, affaiblie depuis la chute de son fondateur.
La libération d’Allassane Bala Sakandé, président du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), n’a pas mis fin aux interrogations et aux commentaires. Pourquoi le chef du parti du président déchu, Roch Marc Christian Kaboré, a-t-il été interpellé durant plusieurs heures dimanche 27 mars ? Le principal intéressé a la réponse : « La conférence de presse organisée le 24 mars dernier par notre parti pour demander la libération du président Kaboré en est la cause », assure Bala Sakandé.
Celui-ci avait alors dénoncé les difficiles conditions que subissait l’ancien chef de l’État, renversé en janvier dernier par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba. Roch Marc Christian Kaboré est privé de téléphone et de visites autres que celles de son médecin, de ses aides de camp, de ses enfants et de son épouse, qui ne peuvent le voir qu’une heure par jour. Plus tôt dans la journée ce dimanche, les conseils de Bala Sakandé avaient dénoncé l’interpellation de leur client, jugeant que cet acte n’était « ni ordonné, ni autorisé par les autorités légales de poursuite ».
Cabale ?
Au sein du MPP, on craint qu’une chasse aux sorcières ne soit menée parmi les caciques de l’ancien régime. « Bala Sakandé n’a fait qu’exprimer une opinion. Réclamer la libération du président Kaboré ne devrait pas être une affaire d’État. Il y a des problèmes plus pressants à résoudre », fustige Hyppolite Aimé Bayala, un militant du parti, reflétant l’état d’esprit général au sein de l’ex-formation au pouvoir.
Mais l’analyste politique Siaka Coulibaly ne voit en cette arrestation ni une volonté de lancer une cabale contre le parti de Kaboré ni une tentative de restreindre les activités politiques. « Le MPP n’est pas dans le collimateur des putschistes, autrement, la junte aurait déjà procédé à des arrestations massives. L’interpellation de Bala Sakandé est un fait isolé lié à sa déclaration sur l’armée », explique Siaka Coulibaly. Bala Sakandé avait affirmé que tant qu’elle participerait à des coups d’État, l’armée ne serait pas républicaine.
Démissions
Cet événement va-t-il permettre au MPP de resserrer les rangs ou contribuer au contraire à affaiblir son chef ? Depuis le coup d’État, Bala Sakandé est de plus en plus contesté. Alors que l’ex-président de l’Assemblée nationale était supposé très proche de Roch Marc Christian Kaboré et que beaucoup voyaient en lui un dauphin potentiel, certaines franges du MPP tentent de lui en ôter la présidence. D’autres personnalités, tel le député Abdoulaye Mossé, ont décidé de démissionner de la formation.
« Bala Sakandé a été imposé à la tête du parti au grand dam des ténors comme Simon Compaoré [fondateur du MPP au côté de Kaboré en 2014]. Cela alimente les dissensions au sein de la formation et a contribué à amenuiser l’influence du président Kaboré au sein de sa famille politique, qu’il n’a jamais vraiment associée à sa gestion du pouvoir », commente Siaka Coulibaly. (Jeune Afrique)