La Guinée, trois ans seulement après le référendum constitutionnel de 2020 et qui traverse actuellement une transition militaire, s’achemine à nouveau vers l’élaboration d’une nouvelle Constitution.
C’est l’une des prérogatives que la Charte de la transition guinéenne affecte au Conseil national de la transition, le CNT, qui fait office d’organe législatif, en cette période d’exception.
La tenue d’un symposium constitutionnel à Conakry, la semaine dernière, a été un nouveau pas franchi vers l’aboutissement du projet.
Désormais, l’étape fondamentale reste le débat d’orientation constitutionnelle, selon Jean Paul Kantambadouno, rapporteur de la Commission Constitution, lois organiques, administration publique et organisation judiciaire au CNT.
Pour lui, « une fois qu’on aura abordé les grands sujets, nous passerons à la phase d’élaboration du projet de Constitution. Nous nous inspirerons de l’ensemble des projets déjà disponibles, mais nous prendrons aussi en compte les conclusions qui résulteront du débat d’orientation constitutionnelle. »
S’accrocher au pouvoir
Mais plusieurs acteurs de la société civile voient dans cette nouvelle Constitution un moyen pour les militaires au pouvoir de prolonger la transition. C’est le cas de Mamadou Kaly Diallo, de la Démocratie sans violences, la Baïonnette intelligente.
Il estime que « s’il y avait une volonté politique réelle d’aller vers un retour rapide à l’ordre constitutionnel, je me dit qu’une commission pouvait aussi faire une relecture de la Constitution du 10 mai 2010, parce que c’est une Constitution qui est très avancée en matière de protection des libertés fondamentales et des questions des droits de l’homme, un domaine dont la Guinée souffre profondément. »
Par ailleurs, certains Guinéens considèrent que la priorité est avant tout de réconcilier le pays alors que le Front national de défense de la Constitution a repris les manifestations pour faire pression sur la junte. Pour cet habitant de Conakry, « ce n’est pas la priorité. Aujourd’hui, la priorité devait être de réunir les acteurs de la société autour de la table de dialogue. Cela va nous permettre de gagner en temps et en économie. »
Cinq Constitutions en 65 ans
Le juriste constitutionnaliste Fayemba Mara reconnaît à l’actuel CNT la légitimité d’élaborer un projet de Constitution. Mais il souhaite un texte qui soit basé sur le consensus et défende les intérêts de tous les Guinéens.
Selon lui, « en ce qui concerne la Constitution et sa sensibilité, nous préférons que la réconciliation soit d’abord faite, que les acteurs socio-politiques soient ensemble pour pouvoir trouver un consensus et ce consensus va décider des conditions dans lesquelles cette Constitution va être élaborée pour qu’elle représente les préoccupations de tous les Guinéens et qu’elle résiste au temps. »
En 65 ans d’indépendance la Guinée a déjà connu cinq Constitutions, une loi constitutionnelle et une charte de la transition. (dw.com)