Le candidat du pouvoir à la présidentielle au Niger, Mohamed Bazoum, l’a emporté avec près de 56% des voix face à son adversaire Mahamane Ousmane, une victoire qualifiée de « hold-up électoral » par l’opposition.
« Je serai le président de tous les Nigériens », a déclaré Mohamed Bazoum à ses partisans et à la presse en félicitant son adversaire battu à qui il a tendu la main: « Connaissant sa sagesse, je voudrais compter sur lui ».
Bazoum, très proche du président sortant Mahamadou Issoufou qui ne se représentait pas, a obtenu 55,75% des voix contre 44,25% à Ousmane, un ancien président dans les année 1990 qui cherche depuis à la redevenir, selon les résultats annoncés par la Commission électorale nationale indépendante (Céni).
Provisoires, ils doivent être confirmés par la Cour constitutionnelle.
Le taux de participation au second tour de dimanche a été de 62,91%: Bazoum a recueilli 2.501.459 voix contre 1.985.736 à Ousmane sur un total de 7,4 millions d’électeurs appelés à voter.
Mohamed Bazoum avait récolté 39,3% des suffrages au premier tour du 27 décembre 2020, contre presque 17% à Mahamane Ousmane.
Bazoum l’a très largement emporté dans les régions de Tahoua (sud-ouest), fief d’Issoufou, et celles d’Agadez (centre) et de Diffa (sud-est).
La région de Tillabéri, dans l’ouest, en proie à l’insécurité liée à la présence des jihadistes de l’Etat islamique, a elle majoritairement voté pour Ousmane, comme la capitale Niamey qui reste un fief de l’opposition.
– Manifestations –
Juste avant la proclamation de ces résultats, l’opposition a dénoncé « un hold-up » électoral, exigeant « la suspension immédiate de la publication des résultats ».
« Je demande à tous les Nigériens (…) de se mobiliser comme un seul homme pour faire échec à ce hold-up électoral », a déclaré à la presse Falké Bacharou, directeur de campagne Mahamane Ousmane.
Il s’exprimait à Niamey dans une ambiance surchauffée du siège d’un parti allié où des jeunes militants criaient « Tchanji! », le « changement » en langue haousa.
Près du siège du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS, au pouvoir) où Mohamed Bazoum a pris la parole, des manifestants d’opposition ont été dispersés par des policiers présents en nombre et tirant du gaz lacrymogène, a constaté un journaliste de l’AFP.
Les manifestants, armés de bâtons, ont mis le feu à des pneus et une épaisse fumée noire a longtemps été visible.
Des manifestations ont également eu lieu à Zinder, la deuxième ville du pays, selon un journaliste local.
La vraie réussite du scrutin dans ce pays sahélo-saharien à l’histoire marquée par les putschs et déjà confronté à de multiples défis – dont celui des attaques jihadistes – réside dans l’acceptation des résultats par toutes les parties une fois les résultats annoncés, selon de nombreux observateurs.
– Second tour endeuillé –
Entre les deux tours, l’opposition avait déclaré qu’elle ne reconnaîtrait pas les résultats si elle les estimait entachés de fraudes.
Elle avait déjà dénoncé des fraudes lors du premier tour, mais avait été déboutée par la justice.
Si elle avait refusé de participer à la Céni au premier tour, elle l’avait finalement rejointe pour le second.
Le second tour a été endeuillé par la mort d’au moins huit agents électoraux: le véhicule de sept d’entre eux a sauté sur une mine dans la région de Tillabéri frontalière du Mali et du Burkina Faso dans la zone dite des « trois frontières », un autre a été tué dans la région de Diffa frontalier du Nigeria.
La zone des « trois frontières » est la cible des attaques de groupes jihadistes affiliés à l’organisation Etat islamique, l’est étant lui frappé par des attaques des jihadistes nigérians de Boko Haram.
Mohamed Bazoum a reconnu mardi soir « l’urgence et l’énormité du défi que constitue le combat contre le terrorisme ».
Le président Mahamadou Issoufou, 68 ans, ne se représentait pas à l’issue de ses deux mandats constitutionnels, contrairement à de nombreux chefs d’Etat africains qui s’accrochent au pouvoir.
Cela sera la première fois que deux présidents élus se succèdent dans ce pays à l’histoire jalonnée de coups d’Etat depuis son indépendance de la France en 1960. (Afp)