Étonnante image, ce dimanche, en Biélorussie. Alors que dans la rue, la contestation de la réélection d’ Alexandre Loukachenko a une nouvelle fois montré sa vigueur, le président s’est lui affiché avec une Kalachnikov, non loin de l’un des points de rassemblement des manifestants.
Des dizaines de milliers de Biélorusses sont en effet sortis dans tout le pays montrer leur détermination face à celui que l’on qualifie souvent de « dernier dictateur d’Europe ». À Minsk, la capitale, la foule s’est réunie sur la place de l’Indépendance et dans les rues environnantes, brandissant des drapeaux blanc rouge, les couleurs de la contestation, et en scandant des slogans tels que « Liberté! » et « Loukachenko dans le fourgon cellulaire!
Mais dans la soirée, une vidéo du président Alexandre Loukachenko a été publiée sur le compte Telegram de la présidence. Cette dernière le montre en gilet pare-balle et un fusil d’assaut Kalachnikov à la main, arrivant en hélicoptère à sa résidence de Minsk, située non loin des manifestations de l’opposition.
Auparavant, des médias et des comptes de la messagerie Telegram liés à l’opposition ont annoncé qu’il avait plus de 100 000 manifestants dans la capitale pour le deuxième dimanche consécutif. Si le comptage est difficile à vérifier, les photos montrent indéniablement une véritable mobilisation.
Les contestataires dénoncent la réélection jugée frauduleuse le 9 août d’Alexandre Loukachenko, au pouvoir depuis 26 ans, ainsi que la répression brutale qui l’a suivi.
« S’il a vraiment gagné l’élection (avec 80 % des voix) alors pourquoi tant de gens sortent dans la rue contre lui ? », feint de s’interroger Evgueni, un manifestant de 18 ans.
Loukachenko « veut que tous se dispersent et vivent comme avant (le scrutin). Mais ça ne sera plus jamais comme avant », martèle de son côté Nikita, 28 ans.
Les forces antiémeutes (OMON), armées notamment de canons à eau, ont été déployées en nombre.
Le ministère de la Défense a prévenu qu’en cas de troubles près des mémoriaux de la Deuxième guerre mondiale, des lieux de manifestations ces deux dernières semaines, les responsables auraient à faire « non pas à la police, mais à l’armée ».
Plus de 100 000 personnes dimanche dernier
La semaine dernière à Minsk, plus de 100 000 personnes s’étaient rassemblées pour réclamer le départ de M. Loukachenko, qui n’avait jamais été confronté à une telle contestation, en nombre comme en durée.
Le président biélorusse reste intraitable et refuse de quitter ses fonctions, comme le demande notamment sa principale opposante politique, Svetlana Tikhanovskaïa, qui s’est réfugiée en Lituanie après les résultats du scrutin. Ses proches assurent qu’elle a dû fuir le pays à cause de nombreuses menaces.
LIRE AUSSI > Manifestations en Biélorussie : « Je subis une pression importante de la part du pouvoir »
Les autorités biélorusses ont par ailleurs engagé cette semaine des poursuites pour « atteintes à la sécurité nationale » contre le « Conseil de coordination » formé par l’opposition pour promouvoir une transition politique post-électorale.
Loukachenko met l’armée en état d’alerte
Alexandre Loukachenko a de son côté juré de « régler le problème » de la contestation, fruit d’un complot occidental selon lui, et a même mis en état d’alerte l’armée ce samedi, accusant l’Otan de manœuvrer aux frontières de la Biélorussie.
Le président biélorusse a jusqu’ici pu compter sur la fidélité de l’armée, de la police et des services secrets, même s’il a enregistré des défections dans les médias d’Etat et des entreprises publiques.
Les partisans du président ont aussi prévu ce dimanche des manifestations de soutien avec des cortèges de voitures.
Moscou a pour sa part signifié son soutien à Alexandre Loukachenko, malgré des relations tendues ses derniers mois, tandis que l’Union européenne a prévu de sanctionner le pouvoir biélorusse. (LeParisien)