Pour la doctorante en droit public Danielle Mouori, au Mali, « le système politique est bloqué », en témoigne le recours à l’armée.
Après la démission du président IIbrahim Boubacar Keïta, dit IBK, tard dans la nuit de mardi 18 à mercredi 19 août, retour sur le système politique du Mali avec Danielle Mouori, doctorante en droit public à la Sorbonne, spécialiste de l’accompagnement des processus électoraux en Afrique subsaharienne francophone.
La mise en place d’élections démocratiques annoncées par les militaires est-elle plausible ?
Le coup d’État, avec la prise de pouvoir par les armes, ne donne pas de crédibilité au Comité national pour le salut du peuple. Il y aura forcément des conséquences politiques et économiques au niveau de la sous-région et peut-être même des suspensions d’accords que l’État a passés avec des organisations internationales. On ne sait pas quand le processus électoral va être installé. Et s’il est instauré, cela peut être un éternel recommencement de l’histoire malienne. Après le coup d’État de 2012, il y a eu l’élection d’Ibrahim Boubacar Keïta. Le peuple avait mis tout son espoir dans le changement. Reste à savoir si ce mouvement saura mettre en place un dialogue national avec toutes les parties de l’opposition et même des négociations avec des groupes djihadistes au nord et au centre du pays.
Coup d’État ou insurrection populaire ?
C’est d’abord une insurrection populaire, ça a commencé déjà par la société civile qui s’est transformée en mouvement du 5 juin. Mais ça devient un coup d’État parce que la prise du pouvoir est illégale, même s’il paraît salvateur, c’est anticonstitutionnel. C’est dommage car, quand on regarde le contexte politique du Mali, on a toujours recours à l’armée, à chaque fois que l’on rencontre des problèmes avec le gouvernement. Le système politique est bloqué, tout est à refaire.
Quels rôles pour les organisations régionales dans la sécurité et la politique au Mali ?
Ce sont les forces armées françaises qui agissent au niveau du Sahel et il n’y a pas d’espoir au niveau de la sous-région pour mobiliser les troupes. Mais là où l’on pourra compter sur les organisations régionales, c’est au niveau de la médiation, instaurer un dialogue pour trouver une solution paisible. (OuestFrance)