Une délégation du Comité Exécutif du Conseil National de la Jeunesse a été reçue par le Premier Ministre, Dr Choguel Kokalla Maïga, le vendredi 17 septembre 2021 à la Primature. L’objet de ladite rencontre, tel qu’aborder par le PM, était d’expliquer à la faitière de la jeunesse les initiatives du gouvernement en cours dans le cadre des réformes politiques et institutionnelles, la mise en place de l’organe unique de gestion des élections. Choguel a profité de l’occasion pour clarifier certains sujets le concernant et expliquer la position ferme des autorités de la transition à redresser le Mali mis à terre durant des décennies à cause de la mauvaise gouvernance. Pour ce qui est du respect du délai de la transition, il a dégagé sa position sans ambiguïté : « Il n’y aura pas d’élections sans les reformes ».
C’est un Premier Ministre très décontracté malgré les menaces de sanction de la CEDEAO à l’encontre des acteurs de la transition si le délai n’est pas respecté qui a reçu une délégation du Comité Exécutif du Conseil National de la Jeunesse conduite par son Président, Habib Dakouo.
A l’entame de ses propos, le Premier Ministre est allé droit au but : « Je vous appelle ce matin pour vous expliquer les actions entreprises par les autorités de la transition dans le cadre du redressement du Mali fragilisé par la mauvaise gouvernance qui a régné en Maitre incontesté durant des décennies. Nous sommes dans la dynamique des réformes politiques et institutionnelles. Et la jeunesse a un grand rôle à jouer en de telle circonstance. Le Gouvernement a besoin de votre accompagnement du début à la fin du processus, c’est à dire de l’étape préparatoire jusqu’à la phase finale. », a expliqué le PM.
Le calendrier fixé dans la charte de la transition est intenable
Selon le Premier ministre, l’élection présidentielle prévue en mois de février 2022 n’est pas possible. Et les raisons sont toutes simples : « lorsqu’on arrivait à la primature, 9 mois avaient déjà été épuisés dans le délai de 18 mois accordé aux autorités de la transition afin d’organiser l’élection présidentielle et passer le flambeau à un pouvoir démocratiquement élu. Après avoir passé en revue les actions de nos prédécesseurs, nous nous sommes rendus compte que rien n’avait été posé comme actions fortes afin de résoudre les causes profondes qui ont conduit à la chute du régime IBK. Alors nous nous sommes dit, qu’il faut commencer par là car rien ne justifie de se précipiter à faire des élections sans refondation. Cela risquerait de nous ramener à la case départ avec la contestation des résultats et le président qui sera élu sera installé sur un fauteuil facilement éjectable puisqu’il pourra être débarqué à tout moment. A cet effet, il est plus qu’urgent de jeter les bases de la refondation de notre Etat à travers des réformes politiques et institutionnelles et aussi procéder à la mise en place de l’organe unique de gestion des élections puisque l’ancien système (Administration territoriales, CENI, DGE) a montré ses limites. Ces différentes initiatives ne sont pas de faits nouveaux. Ils ressortent aussi des recommandations du Dialogue National Inclusif (DNI). Et nous pensons que la transition est le moment idéal pour matérialiser de tels enjeux bénéfiques pour le redressement de notre Nation. Au regard de tout cela, nous ne ferons pas d‘élections sans les reformes. Aucune intimidation de la part de la classe politique qui nous a mis dans ce chaos à cause de sa mauvaise gestion et par-delà la CEDEAO et la communauté international ne nous fera dévier de notre trajectoire ».
L’ex majorité présidentielle et la CEDEAO reçoivent leur dose
Le Premier ministre, Dr Choguel Kokalla Maiga pense que toutes les agitations ici et là sont minutieusement commanditées par des éléments de l’ex majorité présidentielle qui ont au-delà du Mali des réseaux à l’extérieur en mouvement contre les autorités de la transition. Il commence ses explications par les tirs croisés dont la cible principale est sa propre personne : « compte tenu de notre ferme volonté de voir clair dans la gestion de l’ancien régime et remettre les dossiers à la justice, des éléments de l’ancien régime cherchent par tous les moyens à me salir. Ils veulent m’isoler afin de m’abattre et ensuite s’attaquer au Président de la Transition. Raison pour laquelle, ils passent par des videomen et bloggeurs avec des bouts de papiers erronés et manipulés. Qu’ils sachent que leur plan ne marchera pas. Je suis le fonctionnaire le plus contrôlé dans l’histoire du Mali. Au temps d’IBK, ils ont fourré le nez dans toutes mes gestions : des départements que j’aie dirigés à l’AMRT. Ils n’ont rien trouvé. Puisque les rapports étaient destinés à l’administration et non la justice, à la veille de la chute d’IBK ils étaient dans la posture de réorienter leur chasse à l’homme contre moi, en confiant mon dossier à un juge qui allait me placer sous mandat de dépôt. L’opération était prévue pour le 18 et le même jour IBK est tombé. », a martelé le PM avant de continuer son exposé :
« Vous savez, le DNI qui recommande les reformes et l’organe Unique de gestion des Elections est à l’actif de l’ex majorité présidentielle. Alors pourquoi s’opposer à la matérialisation de ces souhaits maintenant ? Dans l’histoire du Mali, d’Alpha Oumar Konaré à IBK en passant par ATT, les régimes successifs ont tous voulu faire des reformes sans succès puisqu’ils ont tous été contraints à cela au moment où ils étaient en disgrâce. Alors c’est le moment plus que jamais de rendre concrets ces vœux sans lesquels le Mali continuera à souffrir.
Ils parlent du respect de délai, de leur non-participation aux assises nationales de la refondation. Leur intention réelle est connue. Le Gouvernement travaille afin de déceler tous les sales dossiers et les transmettre à qui de droit. Pour ce qui concerne les assises, une bonne partie de la classe politique est d’accord, la société civile, les religieux, les syndicats… en un mot, presque toutes les sensibilités de notre pays sont résolument engagées à faire de cette étape ultime un franc succès et gage de nouveau souffle pour notre pays.
Vous constatez vous-mêmes que le front social a été pacifié. Nous avons pu le faire avec pragmatisme. On est parti des dossiers les plus compliqués aux moins essentiels. Ce qui a fait que, nous avons trouvé un accord avec l’UNTM, la CSTM, les surveillants de prisons, les syndicats des greffiers et autres. Et aucune des discutions n’a dépassé 15 jours. Là où le régime IBK a fait des années. Aujourd’hui, on s’est compris et tout le monde aspire au changement qui se fera inchallah.
Le communiqué de la CEDEAO qui circule un peu partout, sachez que la menace ne nous déstabilisera pas. Nous savons le bien fondé d’un tel agissement. Mais ce que je vais vous dire, s’il s’agit de gel des savoirs je ne connais personne au sein du gouvernement qui a des avoirs à l’étranger. En tout cas, nous sommes intransigeants sur nos pas. Ce sont les assises qui détermineront l’avenir du Mali.
La CEDEAO parle aussi de politiques illégalement enfermés (allusion certaine à Soumeylou Boubeye Maïga) et elle mentionne aussi que l’endroit où ils séjournent n’est pas digne de leurs rangs. Pour ceux qui connaissent l’histoire politique du Mali, savent ce qui est arrivé à Seydou Badian Kouyaté, Mohamed Lamine Traoré, Mountaga Tall… ils ont été tous arrêtés sous différents régimes et enfermés comme les autres citoyens prisonniers civils au Mali. »
Un coup d’Etat était en gestation contre la transition
La grogne des policiers éléments du GMS a inquiété plus d’un. Ils s’étaient farouchement opposés au placement sous mandat de dépôt du commandant de la FORSAT police. Munis d’armes, ils se sont dirigés vers la Maison centrale d’Arrêt de Bamako et ont exigé sans condition la relaxe de leur frère. Et à la grande surprise de tout le monde, le geôlier est sorti de prison. Le Premier ministre explique ce qui était prévu ce jour : « Un coup d’Etat était prévu contre les autorités de la transition le jour de la manifestation des éléments du GMS qui exigeaient la libération du commandant de la FORSAT police. Des slogans favorables à d’autres prisonniers étaient scandés ; il y avait l’intention de créer un cafouillage devant la MCA avec un accrochage entre les surveillants de prison et des policiers armés afin de faire des morts, casser la prison et laisser s’échapper des prisonniers dangereux ensuite procéder au renversement du pouvoir. Des éléments tapis dans l’ombre travaillaient activement pour cela. Mais nous avons pu désamorcer la bombe. Et il a été exigé sur le policier de se rendre dans un délai non négociable ; faute de quoi, l’Etat allait prendre ses responsabilités. C’est ainsi qu’il s’est rendu de lui-même au camp1. Pour ce qui est à savoir pourquoi c’est le commandant Forsat police qui a été entendu et placé sous mandat alors qu’il y a trois composantes dans la Forsat, c’est la composante police qui a été déployée et a tué des manifestants devant la mosquée de l’Imam Dicko. Nous sommes pour la justice et plusieurs personnalités y compris Mahmoud Dicko ont été entendues par les juges.
Nous sommes en train de travailler et nous n’accepterons jamais le désordre. Tout individu qui sera pris dans des actions malveillantes tentant à déstabiliser la transition sera châtié par les lois maliennes. »
Des milliards s’évaporaient illégalement chaque année des caisses de l’Etat
L’un des maux de la gouvernance au Mali, c’est la corruption, le favoritisme en un mot la mauvaise gouvernance. Après l’affaire des équipements militaires qui suscite beaucoup de commentaires avec l’enferment de Soumeylou Boubeye Maïga et d’autres hauts gradés de l’armée, les autorités de la transition ont décidé d’ouvrir d’autres casseroles impropres. Pour ce faire, elles ont l’intime conviction de faire l’audit de tous les services de l’Etat. « Nous allons faire l’audit de tous les services de l’Etat afin de savoir comment des milliards sont illégalement évaporés ; comment des bâtiments de l’Etat (de valeur de milliard chacun) ont été bradés à des opérateurs économies à cent, deux cent millions.
Nous avons aussi décelé un système favorisant le décaissement de vingtaines de milliards dans les caisses de l’Etat au bénéfice des sociétés écrans et personne ne sait qui sont les actionnaires. Il y a aussi le cas des pluies dites provoquées. Chaque année, deux milliards sont pris dans les comptes de l’Etat pour raison de frais pour les pluies provoquées tandis qu’il n’en est rien. Aucune pluie n’a été provoquée. Il faut voir clair dans tout ça et prendre des dispositions qui s’y prêtent afin de remettre l’Etat dans ses droits. »
Après ce long exposé, le Président du CNJ, Habib Dakouo, s’est dit satisfait des propos du Premier ministre. Il dira par la suite au PM que la jeunesse malienne est prête à accompagner les autorités de la transition pour la réussite de leur mission. « Notre motivation, ce sont les propos du Président de la Transition lorsqu’il nous a reçus à Koulouba. Il nous a dit que ça mission est celle de la jeunesse et s’il échoue, c’est la jeunesse qui a échoué. Nous sommes entièrement disposés à prendre pleinement part aux préparatifs et les journées proprement dites des assises de la refondation. »
Le Président Dakouo a profité de l’occasion pour exposer les doléances de la jeunesse : « c’est vrai nous sommes logés dans une villa payée par l’Etat, par moment il nous accompagne financièrement aussi à travers le ministère des sports ; mais nous avons vraiment besoin de l’assistance conséquente des autorités de la transition car la jeunesse est le pilier essentiel de toute nation et si elle est mise dans de bonnes conditions, elle peut jouer un rôle capital dans le cadre du redressement de l’Etat ».
Le Ministre de la Jeunesse et des Sport était aussi de la partie. Il a plaidé la cause de la jeunesse auprès du Premier Ministre afin dise-t-il que « ses soldats » puissent être mis dans des conditions pour accomplir leurs missions patriotiques au bénéfice de la Nation toute entière.
En réponse aux doléances, le Premier Ministre dit avoir pris bonne note et fera ce qui est possible dans un premier temps après la rencontre entre les Ministres de la Refondation, des Sports et le comité exécutif du CNJ. Pour l’instant, aucune date n’a été fixée pour cela. (Le Pays)