Le Tchad a connu une journée particuliérement meurtrière ce jeudi 20 octobre 2022.
Les manifestations organisées par l’opposition ont fait une cinquantaine de morts à travers le pays, selon le Premier ministre Saleh Kebzabo, qui a annoncé la « suspension de toute activité » d’importants groupes d’opposition et un couvre-feu.
Le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, dit « condamner fermement la répression des manifestations ayant entrainé mort d’hommes ».
Moussa Faki appelle les parties « au respect des vies humaines et des biens et à privilégier les voies pacifiques pour surmonter la crise. »
L’UA avait exigé le 19 septembre dernier, que la junte ne prolonge pas les 18 mois de transition, « et avait aussi rappelé qu’aucun membre du Conseil militaire de transition ne pourra être candidat aux élections à la fin de la transition ».
Un appel qui n’a pas eu d’échos auprès de la junte militaire, ce que déplore Enrica Picco, directrice de projet Afrique centrale à l’International Crisis Group (ICG).
« Les différents partenaires internationaux ont déjà condamné le manque de respect des engagements pris par la junte militaire. La répression policière est quelque chose qu’on n’avait pas vu dans les rues de la capitale depuis les protestations suite à la mort d’Idriss Déby. Les partenaires devraient condamner ces violences, la répression de ces manifestations « , estime la chercheuse de International Crisis Group.
L’Union africaine attendue
Avec la répression de ce jeudi, l’organisation continentale pourrait peut-être changer de ton envers le pouvoir tchadien, envisager des sanctions. C’est en tous cas ce que souhaite Laurent Duarte, secrétaire exécutif de l’ONG Tournons La Page.
» L’Union africaine doit se saisir de la question tchadienne. Il y a eu une réaction ferme de monsieur Faki. Il faut que les Etats se saisissent collectivement de la situation au Tchad car la répression qui s’instaure est source d’instabilité pour la région. Il faut demander une enquête indépendante sur la répression et surtout trouver une solution politique pour que le Tchad ne s’enferme pas dans un nouveau cycle de violences », explique Laurent Duarte.
Des enquêtes indépendantes
Critiquée pour son soutien à la junte militaire au lendemain de la mort d’Idriss Déby Itno, la France, par la voix du ministère des Affaires étrangères, a vite condamné les violences de ce jeudi, notamment l’utilisation d’armes létales contre les manifestants.
Condamnation également du Canada qui demande aux acteurs politiques de privilégier le dialogue politique.
» La France et l’Union européenne doivent demander des enquêtes indépendantes, demander que l’impunité cesse. La France continue de maintenir une coopération militaire et sécuritaire forte avec le Tchad et il faut que cela cesse. Il faut que la France puisse montrer qu’elle n’a aucune sorte de responsabilité dans la répression en cours. L’Union européenne doit s’affirmer comme un acteur qui défend les droits humains », dit Laurent Duarte.
Le Rapporteur spécial de l’Onu sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association pour sa part appelle à la désescalade de la tension. Clément Voule avertit : Tout recours à un usage excessif de la force contre les manifestants expose leurs auteurs à des poursuites. (dw.com)