La cour d’appel de Paris a confirmé la condamnation de l’ex-président à trois ans d’emprisonnement, dont un an ferme, pour corruption et trafic d’influence, dans l’affaire dite « Bismuth ».
L’ex-président français Nicolas Sarkozy a été condamné, ce mercredi 17 mai, en appel à Paris à trois ans de prison, dont un an ferme à exécuter sous bracelet électronique, pour corruption et trafic d’influence. Une sanction inédite pour un ancien chef de l’État en France.
La cour d’appel de Paris a confirmé la peine prononcée en première instance, le 1er mars 2021, contre l’ancien homme fort de la droite française, qui a écouté la décision assis sur le banc des prévenus, la mâchoire serrée.
Après l’annonce du verdict, son avocate a aussitôt annoncé que l’ancien chef de l’État allait se pourvoir en cassation. « Nicolas Sarkozy est innocent des faits qui lui sont reprochés », a déclaré Me Jacqueline Laffont. « Nous irons jusqu’au bout du chemin judiciaire », a-t-elle ajouté, évoquant une décision « stupéfiante ».
SITUATION INÉDITE
Nicolas Sarkozy, 68 ans, est le premier ancien président condamné à de la prison ferme. Son ancien mentor, Jacques Chirac, s’était vu infliger en 2011 deux ans de prison avec sursis dans un dossier d’emplois fictifs à la ville de Paris.
Son avocat historique Thierry Herzog, 67 ans, et l’ancien haut magistrat Gilbert Azibert, 76 ans, ont été également reconnus coupables d’avoir noué un « pacte de corruption » avec Nicolas Sarkozy en 2014. Les deux hommes ont été condamnés à la même peine.
En outre, la cour d’appel a prononcé une interdiction des droits civiques de trois ans pour Nicolas Sarkozy, ce qui le rend inéligible, ainsi qu’une interdiction d’exercer de trois ans pour Me Herzog.
Le 13 décembre, le parquet général avait réclamé trois ans d’emprisonnement avec sursis à l’encontre des trois prévenus, qui ont toujours nié toute corruption. L’ancien locataire de l’Élysée (2007-2012) a contesté « avec la plus grande force » lors du procès en appel ces accusations, réaffirmant à la barre n’avoir « jamais corrompu qui que ce soit ».
FINANCEMENT ILLÉGAL DE SA CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE
Cette décision était attendue alors que Nicolas Sarkozy sera rejugé en appel à l’automne dans une affaire de financement illégal de sa campagne présidentielle de 2012, et qu’il est sous la menace d’un troisième retentissant procès. En effet, le parquet national financier (PNF) a requis jeudi son renvoi en correctionnelle dans l’affaire des soupçons de financement libyen desa campagne présidentiel de 2007.
Cette affaire libyenne, qui met également en cause trois anciens ministres de l’ex-président, est indirectement à l’origine du dossier de corruption qui vient d’être jugé en appel.
Fin 2013, les juges d’instruction chargés de l’enquête sur les soupçons de corruption libyenne décidaient de « brancher » les deux lignes de Nicolas Sarkozy. C’est ainsi qu’ils découvrent l’existence d’une troisième ligne, officieuse.
Achetée le 11 janvier 2014 sous l’identité de « Paul Bismuth » – une connaissance de lycée de Me Herzog – elle est dédiée aux échanges entre l’ancien président et son avocat et ami de longue date, Thierry Herzog. Leurs conversations téléphoniques au langage parfois fleuri, diffusées pour la première fois à l’occasion du deuxième procès en décembre, sont au cœur du dossier.
UN « COUP DE POUCE »
Pour l’accusation, ces écoutes font transparaître un pacte de corruption noué avec Gilbert Azibert, alors avocat général à la Cour de cassation, la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français.
Ce dernier est accusé d’avoir œuvré en coulisses pour peser sur un pourvoi formé par Nicolas Sarkozy dans l’affaire Bettencourt, en échange d’un « coup de pouce » pour un poste honorifique à Monaco. L’ancien chef de l’État a été en effet un temps inculpé pour « abus de faiblesse » concernant Liliane Bettencourt, l’héritière de L’Oréal. En 2013, il bénéficiait finalement d’un non-lieu « en l’absence de charges suffisantes ».
Depuis les prémices de l’affaire, les avocats des prévenus affirment que ces écoutes sont illégales, car elles portent selon eux atteinte au secret des échanges entre un avocat et son client. (elle.fr)