Arrivé en tête de l’élection présidentielle au Gabon avec 90,35 % des voix, Brice Oligui Nguema gomme définitivement son statut de militaire putschiste pour arborer le costume de président démocrate. Il devance de loin ses adversaires, dont le dernier Premier ministre d’Ali Bongo, Alain-Claude Billie by Nze qui bénéficiait pourtant de soutiens importants dans la diaspora. Cette élection inédite n’a néanmoins pas réussi à endiguer les soupçons de tricherie.
Les directs des chaînes de télévision nationales ont tenu en haleine les Gabonais de nombreuses heures. Initialement attendus à 13 h 30, les résultats de l’élection présidentielle au Gabon sont finalement tombés, ce dimanche 13 avril, après 16 h 30 donnant la victoire à Brice Oligui Nguema avec 90,35 % des voix. Le général a collecté jusqu’à 97,18 % dans sa province natale du Woleu-Ntem, au nord du pays.
Pas de surprise
À l’annonce de ces résultats, les sympathisants du général ont explosé de joie. Le quartier Bas de Gué-gué, au nord de la capitale, inhabituellement calme en début d’après-midi, s’est doucement réveillé dans la soirée pour célébrer l’élection du chef de la transition. La liesse a envahi, ce dimanche 13 avril, les commerçants encore installés au bord de l’échangeur des Charbonnages en fin de journée. L’ambiance tranche avec les manifestations de colère durement réprimées au même endroit en 2009 et en 2016 à l’élection d’Ali Bongo. Mais elle rappelle la joie collective exprimée au lendemain du putsch du 30 août 2023. Cette fois-ci, néanmoins, ce n’est pas par la force, mais bien grâce au résultat des urnes que le général se hisse à la magistrature suprême.
« Il l’a fait », déclare un vieil homme étrangement l’air étonné comme s’il ne s’y attendait pas. Pourtant, pour la grande majorité, l’élection était gagnée d’avance. « C’est bon ou c’est pas bon ? » lance en criant un jeune homme. À quoi répond « c’bon » la petite foule amassée autour de lui en référence à Brice Oligui Nguema (BON). Puis, les individus se sont mis à chantonner « Oligui président ». Au loin, du brouhaha témoigne que dans les quartiers voisins, des Gabonais sont descendus dans la rue. Mais sur le bord de mer, hormis quelques klaxons de joie retentissant, les familles profitant des derniers instants de soleil en cette fin d’après-midi n’ont néanmoins pas tant réagi. « Bon, ce n’est pas une surprise », explique une mère de famille, ravie « quand même » du résultat.
Avec plus de la moitié des suffrages exprimés en sa faveur au premier tour, le chef de la transition, sans surprise, écrase ses sept adversaires, dont Alain-Claude Billie By Nze, dernier Premier ministre du président déchu, qui recueille seulement 3,2 % des voix. Les scores rendent même caduque la tenue d’un second tour prévu par le Code électoral.
Pour cette élection historique, qui marque la fin de la transition et acte le début d’une nouvelle ère, les Gabonais ont été au rendez-vous. D’après le ministère de l’Intérieur, l’élection a connu une mobilisation « historique » avec un taux de participation de 70 %. Initialement annoncé à plus de 87 %, il a été revu à la baisse par les autorités durant la nuit.
« Je tiens à saluer particulièrement la maturité du peuple gabonais, qui s’est distingué durant tout le processus électoral », a déclaré le nouveau président du Gabon depuis le QG de son mouvement Les Bâtisseurs, à Akanda, attendant la confirmation des scores par la Cour constitutionnelle. Dans un court discours empreint de spiritualité, il a invité les Gabonais à éviter le désordre. « Nous devons désormais tourner la page de l’élection présidentielle. Notre pays est en chantier, je vous invite à reprendre vos activités professionnelles », a conclu l’ancien chef d’armée avant de se retirer aux côtés de son épouse.
