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Un morceau du rappeur Logic a sans doute permis d’éviter plusieurs centaines de suicides

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La musique ne fait pas qu’adoucir les mœurs, elle peut aussi sauver des vies. C’est ce que démontre une étude récente publiée dans le British Medical Journal à propos de la chanson du rappeur Logic intitulée «1-800-273-8255». Ce titre fait référence au numéro de Lifeline, le service d’appel d’urgence de prévention des suicides aux États-Unis.

«J’ai rencontré des fans qui me disaient “Ta musique m’a sauvé la vie, tu as sauvé ma vie”», expliquait le chanteur à l’occasion d’une interview. «Ils se tatouent sur les bras des paroles qui ont sauvé leur vie. […] Ça m’a frappé, le pouvoir que j’ai en tant qu’artiste, alors que je n’essayais de sauver la vie de personne. Maintenant, qu’est-ce qui peut arriver si j’essayais réellement?»

Last night a DJ saved my life

Logic, qui a habitué son public à des chansons sensibles évoquant ses états d’âme, a sorti ce titre en 2017. Les paroles évoquent un être au bord du suicide, mais qui trouve le chemin vers la résilience. Le clip qui l’accompagne montre la trajectoire d’un jeune noir rejeté à cause de son homosexualité. Il songe à se donner la mort avant d’appeler la Lifeline et de surmonter cette crise suicidaire.

«1-800-273-8255» a été un succès commercial, avec plus d’un milliard d’écoutes sur Spotify et plus de 430 millions de vues sur YouTube. Durant la soixantième cérémonie des Grammy Awards, Logic a chanté ce titre devant des millions de téléspectateurs. Il l’a dédié à Chris Cornell, le chanteur de Soundgarden, et à Chester Bennington, celui de Linkin Park, qui se sont tous deux suicidés en 2017.

La diffusion de cette chanson puis le passage de l’artiste aux cérémonies des MTV Music Awards et à celle des Grammy Awards a été accompagnée d’une hausse considérable des appels d’urgence en direction de Lifeline. En tout, ce sont 9.915 appels en plus qui ont été passés durant les trente-quatre jours qui ont suivi la diffusion de ces cérémonies, soit une hausse de 6,9%. Et surtout, le taux de suicide a chuté de 5,5% sur la même période, c’est-à-dire qu’il y a eu 245 suicides en moins.

Werther contre Papageno

«Ces découvertes sont vraiment d’une importance cruciale pour la prévention du suicide», explique l’auteur de l’étude, Thomas Niederkrotenthaler. «Elles soulignent qu’une histoire d’espoir et de résilience peut avoir un fort impact sur les populations, les incitant à chercher de l’aide et réduisant ainsi le nombre de suicides.»

L’impact des récits médiatiques de suicides sur les suicides réels est un phénomène bien connu. C’est l’effet Werther, du nom du roman de Goethe Les souffrances du jeune Werther, qui aurait déclenché une épidémie de suicides à sa publication. Cela a été le cas après les suicides de Marylin Monroe, Dalida ou encore Robin Williams. Pendant les quatre mois qui ont suivi la mort de ce dernier, on a comptabilisé 1.800 suicides en plus aux États-UnisUne analyse récente montrait que la médiatisation d’un suicide de star est associée à une augmentation de 13% des suicides en moyenne. Mais l’effet inverse existe aussi.

Certains récits médiatiques sont protecteurs par rapport au suicide: ce sont ceux qui rapportent des histoires de personnes ayant souffert d’idées suicidaires, mais les ont surmontées. Thomas Niederkrotenthaler avait déjà démontré qu’il existe une corrélation négative entre les taux de suicide et la parution de ce type d’articles. L’effet Werther a ainsi son opposé: l’effet Papageno.

Ce phénomène doit son nom au personnage de La Flûte enchantée. Dans l’opéra de Mozart, l’oiseleur Papageno cède au désespoir et envisage de se pendre à un arbre. Mais son geste est interrompu par trois angelots qui lui rappellent les ressources dont il dispose. Par l’exemple d’autres personnes, l’effet Papageno mobilise les ressources intérieures que l’on peut trouver pour faire face aux crises suicidaires. Les récits médiatiques de stars ou de fictions, évoquant les mécanismes d’adaptation, permettent à certains de faire face et de surmonter leur crise suicidaire. Le phénomène avait été déjà constaté, mais jamais avec une telle intensité qu’après la chanson de Logic. (slate.fr)

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